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aussi leur représentation actuelle (cinq députés pour les Alpes, et six députés pour l’Aube) est sans proportion aucune à leur population. En revanche, dix départemens gagneraient un siège : les Bouches-du-Rhône, le Finistère[1], Indre-et-Loire, la Loire, la Manche, Meurthe-et-Moselle[2], la Sarthe, la Seine, la Seine-Inférieure et le Var ; la Loire-Inférieure[3] et le Pas-de-Calais en gagneraient deux ; le Nord seul en gagnerait trois ; ce déplacement d’équilibre se ferait, en pure obéissance à la loi de la population, sans la moindre intervention du caprice ou de l’artifice administratif ; mécaniquement, arithmétiquement.

La Commission du suffrage universel a jugé prudent de s’en tenir là. La difficulté de faire fonctionner la représentation proportionnelle dans les départemens auxquels il ne serait resté que deux députés, l’impossibilité de l’appliquer dans ceux qui n’en auraient plus eu qu’un ; la crainte aussi qu’une trop grande diminution du nombre des députés, sans réduction correspondante du nombre des sénateurs, ne heurtât au moins l’esprit des lois constitutionnelles en rompant l’équilibre entre la Chambre et le Sénat quand par leur réunion se forme l’Assemblée nationale, toutes ces considérations ont invité à modérer et mesurer les retranchemens. Certains membres de la Commission eussent malgré tout voulu une plus large hécatombe ; mais il a paru à la majorité suffisant de marquer l’intention et de donner l’indication, laissant à la Chambre elle-même l’initiative d’aller plus loin, si, comme on le jurait dans tous les partis au lendemain du vote du 22 novembre, elle se sent résolue au sacrifice[4]

  1. Le Finistère gagnait de toute façon un siège, d’après le recensement de 1906.
  2. La Loire-Inférieure gagnerait alors 2 sièges ; elle n’en gagnerait qu’un si rien n’était changé.
  3. Les Alpes-Maritimes, qui gagnaient un siège, garderaient, dans le système de la Commission, le nombre de députés qu’elles ont aujourd’hui.
  4. En prenant pour base 25 000 électeurs inscrits, avec un député de plus pour toute fraction supérieure à 5 000, la réduction serait de 105 députés, ce qui donnerait une Chambre de 494 membres (France continentale seule) ; 510 (avec l’Algérie et les colonies). Sur la base numérique de : un député par 100 000 habitans et fraction de 10 000, on aurait : France continentale, 434 ; Algérie et colonies, 16 ; en tout 450.
    M. Paul Bignon, député de la Seine-Inférieure, a déposé tout récemment une proposition de loi d’après laquelle chaque département élirait « autant de députés qu’il a de fois 100 000 habitans, et un député de plus lorsque la fraction excédante dépasse 50 000 ; » les étrangers ne seraient pas compris dans la population électorale ; et, comme on rétablirait le scrutin de liste, aucun département n’élirait moins de deux députés. Le nombre des députés serait ainsi réduit de 591 à 391 ; soit deux cents députés de moins qu’aujourd’hui.
    De son côté, M. Raoul Péret, député de la Vienne, a pris l’initiative d’un autre contre-projet : scrutin de liste avec un député par 100 000 habitans ou fraction de 100 000 supérieure à 30 000 : ce qui donnerait, pour la France et l’Algérie, 415 députés.