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d’affermer aux communes les terrains qu’elles louent chaque année aux propriétaires de troupeaux transhumans, de façon à maintenir l’équilibre des budgets en y versant autant pour restaurer le domaine communal que la transhumance y versait pour le dégrader. Cette location, qui supprime une importante fraction du bétail conduit dans la montagne, rend tout facile : amélioration des pelouses, reboisement des pentes raides, cantonnement du bétail sur des parcours affectés à chaque troupeau, dont les bergers pourront jouir en bons pères de famille quand ils seront assurés de profiter seuls de leurs travaux et de leur prudence.

Pour passer de la théorie à la pratique, il fallait un instrument de sauvetage. Faisant appel à l’initiative privée, on a fondé l’Association centrale pour l’aménagement des montagnes[1]. Avec les ressources fournies par ses souscripteurs à dix francs par an et par quelques subventions, l’association afferma dès le premier mois de son existence, en mai 1904, 2 000 hectares de terrains communaux sur lesquels elle entreprit aussitôt des travaux de reboisement et d’amélioration pastorale qui procurent aux habitans des avantages immédiats et des richesses à venir, instituant ainsi une leçon de choses pour l’instruction des montagnards et leur conversion à des pratiques moins ruineuses. Les populations ont déjà compris le but et les moyens de l’association, plusieurs communes la sollicitent d’étendre ses opérations sur leur domaine, et sa dernière location lui concède pour dix-huit ans une cinquantaine d’hectares, de terrains dégradés, avec faculté de les clore et d’y faire tous travaux, moyennant un loyer pour ordre d’un franc par an.

L’exemple des départemens de l’Est, où la bonne gestion des forêts a développé la prospérité pastorale pendant que les Pyrénées, se ruinant par le déboisement, perdaient un quart de leur population ; où les seules communes du Doubs ont 3 millions de revenu forestier ; où la production du fromage et du beurre tient une large part dans nos 77 millions d’exportation de ces produits ; où, sur bien des points, la suppression des charges communales et le remboursement par l’affouage des autres impôts mettent les municipalités dans l’obligation de se défendre contre l’immigration, pourra être facilement suivi dans d’autres régions

  1. Siège social à Bordeaux, 142, rue de Pessac.