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L’énergie de M. de Martens, qui présidait la commission, ne suffit pas à masquer la pauvreté du résultat. Un certain nombre de vœux sur la réunion de conférences chargées de réviser la convention de Genève, de définir les droits et les devoirs des neutres, d’étudier l’inviolabilité de la propriété privée sur mer, d’établir des règles en matière de bombardement, accusaient l’impuissance des efforts déployés[1].

La nécessité d’ajouter à l’idée première du gouvernement russe, — réduction des armemens, — des articles supplémentaires avait conduit au paradoxe de faire discuter par « la conférence de la Paix » les lois de la guerre. Au contraire, il était fort légitime de soumettre à son examen des propositions destinées à prévenir l’appel aux armes. C’est à la troisième commission que revint cet examen ; et ce sont ses travaux qui présentent à la fois le plus d’originalité et d’utilité.

Ce n’est pas, à dire vrai, dans l’étude quelle lit de la médiation et dans les stipulations qui s’ensuivirent, qu’on remarque ces deux qualités. La médiation est restée, depuis la conférence, ce qu’elle était avant : un simple conseil facultatif, pour celui qui le reçoit, sans aucun degré d’obligation. On prit soin d’indiquer (art. 3) que « le droit d’offrir les bons offices ou la médiation appartient aux puissances étrangères au conflit, même pendant le cours des hostilités, et que l’exercice de ce droit ne peut jamais être considéré par l’une ou l’autre des parties en litige comme un acte peu amical. » Mais ni dans la guerre du Transvaal, ni dans la guerre russo-japonaise, cette précaution oratoire n’a suffi à provoquer l’offre d’une médiation qu’on savait devoir être mal accueillie. De même, la seule innovation de la conférence en la matière, à savoir la procédure consistant à choisir deux médiateurs au lieu d’un (art. 8), — comme, avant un duel, chaque adversaire choisit des témoins, — n’a jamais fonctionné. Au contraire, le titre III, — commissions internationales d’enquête, — peut être considéré comme le chef-d’œuvre de la conférence. Il a en effet la rare fortune d’être logiquement inattaquable et d’avoir fait ses preuves. L’idée en revient à M. de Martens[2], qui était parti de cette vue très juste que, dans bien des cas, les conflits entre États naissent de faits mal élucidés.

  1. Les textes adoptés à La Haye ne sont d’ailleurs pas respectés par toutes les puissances. Voyez plus loin, p. 829.
  2. Voyez F. de Martens, North American Review, nov. 1899.