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remboursement était reconnu définitivement impossible si l’on n’avait recours à un emprunt.

Une autre communication ne satisfit guère davantage la Chambre. En parlant de la destination qu’il donnerait aux biens séquestrés des princes dépossédés, Bismarck avait dit : « Ne parlez pas d’espionnage ! Je ne suis pas né pour le métier d’espion, ce n’est point là ma nature. Mais nous méritons, je crois, vos remerciemens quand nous nous chargeons de poursuivre de méchans reptiles jusque dans leurs repaires pour observer ce qu’ils y font[1]. » Le fonds des reptiles était devenu le terme par lequel on désignait les revenus séquestrés dont Bismarck disposait. Lasker demanda si le gouvernement se croyait dégagé de l’obligation de rendre compte à la Chambre de son emploi. Le Commissaire du gouvernement réserva sa réponse. Le 10 décembre, par une lettre adressée au Président de la Chambre et signée de tous les ministres, le gouvernement « se déclare prêt à rendre compte, en les faisant figurer au budget, des sommes dont la caisse de l’Etat a le maniement et qui proviennent d’un excédent de la liste civile de l’Electeur de Hesse, perçu depuis la loi de séquestre par les agens préposés à l’administration de ses biens. Quant aux revenus proprement dits, provenant du séquestre des biens du roi de Hanovre et de l’Electeur, le gouvernement ne se croit pas obligé d’en justifier l’emploi, les dépenses et les recettes n’étant pas portées au compte de l’Etat mais à celui des princes dépossédés. Elles sont affectées à la surveillance des intrigues hostiles dirigées contre la Prusse, et cette destination doit, dans l’esprit du Ministère, les soustraire à toute espèce de publicité ; les manœuvres qu’il a eu à surveiller et à déjouer, dans les provinces annexées, ont absorbé les revenus dont il avait la disposition, et ne lui ont pas permis d’en capitaliser les intérêts. » Personne ne crut que les menées dirigées par les deux princes dépossédés contre l’étal de choses établi dans l’Allemagne du Nord, contraignît à employer intégralement des ressources qui s’élevaient au chiffre annuel de 700 000 thalers (2 625 000 francs). Elles trouvaient un emploi plus utile en Espagne, d’abord pour préparer le guet-apens contre nous, puis en Autriche et en France pour acheter des journalistes. Le système de Bismarck à cet égard était des plus ingénieux. Le

  1. Discours du 30 janvier 1865.