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situation d’un voyageur assailli par un brigand « qui lui met le pistolet sous la gorge. » La réaction contre l’esprit révolutionnaire s’accentuera progressivement à partir de la fin de l’année 1790 : le régime jacobin sera, comme l’a montré la magistrale enquête de Taine, le triomphe d’une petite minorité. L’on verra aussi par ces correspondances que les gentilshommes qui restèrent en France eurent une vue bien plus précise de la situation critique où le pays était engagé que les émigrés qui se leurraient d’espoirs chimériques, croyant que rien ne résisterait à leurs intrigues et que la contre-révolution s’opérerait à coup sûr avec le secours de l’étranger. Et puisque le but de l’auteur était de nous exposer le grand fait historique qu’est la mort de la noblesse française, nous dirons, pour conclure, qu’il l’a pleinement atteint, en nous prouvant que ces « aristocrates » n’avaient pas peur de la guillotine et qu’ils marchaient au supplice avec le fier courage qu’ils tenaient de leurs ancêtres.

Ajoutons enfin que ces lettres sont des sources nouvelles que ne devront pas ignorer les historiens futurs : ils y puiseront de précieuses informations sur l’organisation financière, économique, religieuse, militaire et sociale de l’époque. Ainsi les découvertes faites par M. de Vaissière aux Archives lui vaudront, dans un avenir que nous souhaitons prochain, plus d’un tributaire reconnaissant.


RAYMOND DE VOGÜE.