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l’avait réclamé. L’idée de réunir sous la même direction l’enseignement, les lettres et les arts était erronée. Napoléon Ier ne l’avait point eue. Mais le second Empire en avait eu une encore moins heureuse, en accouplant les Beaux-Arts au ministère de l’Intérieur et laissant les Lettres à l’Instruction publique. Les artistes ne peuvent pas être traités comme des préfets, non plus que les écrivains comme des professeurs ; il y faut une autre allure, une main plus souple, plus délicate. Une méthode différente doit présider à la direction d’élémens si divers : l’enseignement n’accorde rien à la fantaisie, à l’originalité, à la nouveauté ; c’est, au contraire, de fantaisie, d’originalité et de nouveauté, que se nourrit l’esprit littéraire et artistique ; l’action du ministre sur l’enseignement est disciplinaire ; il prescrit, réglemente ; cette action sur les lettres et les arts est purement intellectuelle ; elle admire les chefs-d’œuvre et honore les maîtres. L’Empire, trop exclusivement bureaucratique, avait un peu négligé cette chose légère qu’on appelle l’esprit, et qui, en France, fait à la longue plus de besogne que les bureaucrates. L’esprit s’en était vengé en passant du côté de l’opposition, et il faisait rage contre le gouvernement. Il fallait le ramener si cela se pouvait, et le meilleur moyen était de lui ouvrir une maison où il fût chez lui, où ses élus pussent se rencontrer et de lui donner pour maître de cérémonies un personnage considérable dans l’État.


VIII

Le ministère produisit un effet plus considérable encore que je ne l’avais promis à l’Empereur La Bourse monta de deux francs ; ce fut une explosion d’enthousiasme. Edmond About s’écriait : « L’abdication du pouvoir personnel et la formation d’un cabinet parlementaire nous ont donné de belles étrennes. On a vu, du jour au lendemain, la confiance renaître et la sécurité s’affermir. Dans, les rues de Paris, comme dans la province et au milieu des champs, les Français se sont abordés en disant : Voilà qui va bien, mais nous l’avons échappé belle. Un assentiment unanime, ou peu s’en faut, a salué les nouveaux ministres. »

— « Du fond de ce grabat d’incurable, écrivait Montalembert au Duc d’Aumale, où j’achève ma vie qui n’a jamais été