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trop prompts à se transformer en bachi-bouzouks pour se ruer au sac des villages chrétiens. Leur exaspération n’est d’ailleurs pas sans excuse ; l’état d’insécurité où vit la Macédoine les ruine ; pillés par les bandes, appelés pour de longues périodes au service militaire, ils souhaitent autant que les chrétiens la fin d’une situation si troublée.

Chacune des races qui se disputent la Macédoine invoque des argumens tirés de l’histoire ; chacune jette, comme un défi, à la face de ses adversaires, le nom de ses héros nationaux et le souvenir du temps où l’un de ses princes avait établi son empire sur tous les peuples de la péninsule. S’il fallait, pour établir aujourd’hui les droits de chaque groupe, remonter aussi loin dans l’histoire, où conviendrait-il de s’arrêter pour trouver le légitime possesseur, et, avec cette méthode, à qui attribuerait-on l’Italie, par exemple, ou la France ? Les argumens historiques, ainsi présentés, n’ont aucune valeur probante ; ils ne prennent une valeur morale réelle que dans le cas où les traditions sont actuellement vivantes dans les cœurs de toute une population, et ils ne deviennent une force que lorsqu’ils ont à leur service des canons et des baïonnettes.