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progressif ; ce ne sont nullement là, comme on le pense souvent, deux faces différentes d’un même objet. Voici la définition exacte de ces deux modalités essentiellement différentes de l’impôt : quand c’est la minorité des contribuables ou, tout au moins, la minorité de la matière imposable qui profite de dégrèvemens totaux ou partiels et que la majorité des contribuables ou de la matière imposable est assujettie au taux maximum qui devient pour cette majorité un taux uniforme, alors l’impôt est dégressif. Ainsi, dans l’impôt dégressif, c’est la minorité seulement de la matière imposable qui est dégrevée et la majorité de cette matière imposable paie un taux uniforme. Quand, au contraire, les contribuables sont répartis en beaucoup de catégories, chacune, au fur et à mesure qu’on s’élève, de moins en moins nombreuse, et se trouvent assujettis à des taux divers et graduels progressant au fur et à mesure que l’on monte sur l’échelle sociale, scindant ainsi la matière imposable en tranches de plus en plus étroites, de façon que la minorité de la matière imposable paie la plus grande partie de l’impôt, alors l’impôt est progressif. Si l’impôt dégressif accordant une immunité aux échelons tout à fait inférieurs et des modérations aux échelons moindres que moyens, peut être admis, tout en exigeant beaucoup de prudence et de circonspection, l’impôt progressif, qui sure barge notablement la minorité de la matière imposable, doit être absolument proscrit. Un exemple d’impôt dégressif, c’était la contribution mobilière dans les villes, notamment à Paris, avant 1900 ; les loyers soit complètement, soit partiellement dégrevés, ne représentaient, en effet, que la moindre partie de l’ensemble des valeurs locatives ; en 1896 notamment, sur 30 765 865 francs, montant de la contribution mobilière à Paris si fous les loyers y avaient été assujettis au taux uniforme supporté par les loyers moyens ou élevés, 4 543 373 francs seulement, moins du sixième, représentaient les loyers dégrevés et un taux strictement uniforme de taxe frappait tous les loyers au-dessus d’un niveau modique[1].

Le principe fondamental en matière d’impôt, qui admet donc en certains cas, quoique à titre exceptionnel, la dégressivité, condamne absolument la progressivité.

Un autre principe également doit être rappelé à propos de

  1. Voyez notre Traité de la Science des Finances, tome Ier, p. 203-204.