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la vie, le zèle du salut des âmes et la science propre à diriger ce zèle » étaient les qualités essentielles à l’épiscopat, et celui qui ne les réunissait pas ne devait pas être promu à cette éminente dignité, fût-il d’une des premières maisons du royaume ; mais, « quand ces qualités se trouvent jointes à un nom distingué, le sujet, pensait-il, doit être préféré à celui qui, réunissant les mêmes qualités, seroit d’une naissance obscure, car il est certain que la religion a quelque chose de plus respectable aux yeux du vulgaire quand il la voit annoncée et pratiquée par un homme de naissance. »

La préférence accordée à la noblesse était donc chez le Duc de Bourgogne un principe de gouvernement. Mais cette préférence n’allait pas jusqu’à l’exclusion de la roture, contre laquelle on ne le sent animé d’aucune des passions dont déborde Saint-Simon. Bien au contraire, il reconnaît que « c’est servir l’Église que d’élever à l’épiscopat des ecclésiastiques d’un mérite reconnu et d’une éminente sainteté, lors même qu’ils seraient des roturiers, car les talens et la vertu peuvent tenir lieu de la plus haute naissance. » De même il estimait qu’il était bon que, dans tous les régimens, il y eût au moins un officier de fortune qui eût commencé par être soldat. « Ce seroit, disait-il, un encouragement toujours parlant, tant pour le soldat que pour l’officier même qui doit avoir à cœur que le soldat ne lui soit point préféré. » Il aimait à rappeler que, sur un rapport avantageux que lui avait fait Vendôme, il avait fait capitaine un simple sergent du régiment de Navarre.

Il faut ajouter que la noblesse aurait trouvé en lui un surveillant sévère et vigilant. Il annonçait l’intention de prendre des mesures sévères contre les exactions dont certains seigneurs se rendaient coupables, par eux-mêmes et plus souvent par leurs intendans, aux dépens des paysans. Il voulait que certains droits, certaines redevances, abusivement créés par eux fussent abolis, et il aurait certainement cherché avec Fénelon le moyen de mettre en pratique ce bref article des Tables de Chaulnes : punir les seigneurs violens.

Dans son désir de favoriser la noblesse, le Duc de Bourgogne aurait-il été plus loin ? Lui aurait-il assigné un rôle politique ? Après avoir rétabli les ducs et pairs, comme il l’aurait fait incontestablement, dans ces dignités honorifiques dont la perte désolait Saint-Simon et dont la restitution paraissait à leur