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quels seront dans l’avenir les moyens d’action directs ou indirects du gouvernement pontifical et du gouvernement de la République l’un sur l’autre. M. Clemenceau est d’avis qu’il ne doit y avoir entre eux aucun rapport d’aucun genre ; mais il y en aura, qu’il le veuille ou non ; la nature des choses ne changera pas ; et si Rome et Paris n’ont pas entre eux des intermédiaires officiels, d’autres viendront qui ne tireront leur mandat que d’eux-mêmes, ou de leurs groupes, ou de leurs partis, et qui n’en seront pas moins actifs parce qu’ils n’offriront au gouvernement aucune garantie. Les papiers de Mgr Montagnini donneront sans doute une sorte d’avant-goût de l’état de choses nouveau auquel nous marchons, auquel nous sommes.

La Chambre a pu, au surplus, en avoir une première impression assez nette en entendant les dernières paroles de M. le ministre des Affaires étrangères, et les premières de M. Ribot qui lui a répondu. Ces deux discours sont autrement importans que celui de M. Clemenceau, qui n’est que de la polémique. « Vous dites, s’est écrié M. Pichon : — Il n’y a plus de Concordat ; il n’y a plus d’entente avec l’Église, — et vous en concluez qu’une autorité étrangère a le droit d’avoir en France un émissaire qui, par surcroit, était un étranger, chargé d’organiser en permanence la conspiration contre les lois de l’État français, de formuler et de transmettre des ordres destinés à maintenir l’agitation, à organiser le désordre dans la République. Et vous voulez pour cela vous servir des immunités diplomatiques ? Et vous vous adressez pour cela au ministre des Affaires étrangères ? » Voilà la question, en effet : le reste n’est rien. Mais M. Pichon s’imagine-t-il que le Pape consentira jamais à n’avoir aucun agent en France ? Il en avait un auprès du gouvernement ; il en aura un auprès des évêques. C’était un étranger ; ce sera un Français, et il n’en sera que plus fort ; il n’aura que faire des immunités diplomatiques ; on ne pourra pas l’expulser. Mgr Montagnini a représenté une période de transition, un court moment dans notre histoire : il s’agit de savoir comment il sera remplacé, car il le sera. M. Pichon s’est appuyé sur toute la tradition française, mais il s’est appuyé sur elle au moment même où il la reniait. « Je crois, a dit M. Ribot, que les paroles de M. le ministre des Affaires étrangères dépassent sa pensée ; » et il a montré en effet que ces paroles, si on les poussait à leurs conséquences logiques, conduiraient tout droit à la suppression de la liberté de conscience et à la persécution religieuse. Nous serons obligés d’accepter certaines choses que n’acceptaient aucun de nos gouvernemens « depuis suint Louis, comme dit M. Pichon, jusqu’à