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fameux complot que M. Clemenceau a inventé avant les élections dernières et dont on n’a plus parlé depuis.

Ce que contiennent les papiers saisis, nous le saurons dans un mois. On s’attend à des révélations si importantes qu’il y aura sans doute de la déception. Il nous importe assez peu d’apprendre que quelques personnages parlementaires, dont les opinions religieuses et politiques sont très connues, avaient des relations avec Mgr Montagnini, ou même plus directement avec Rome. N’était-ce pas leur droit d’en avoir, et n’est-ce pas celui du gouvernement pontifical de suivre au jour le jour, et de très près, la marche d’une politique qui peut influer d’une manière si grave sur les intérêts dont il a la garde ? Le droit, le devoir même de certains hommes politiques d’entretenir des rapports avec le Saint-Siège ont été affirmés du haut de la tribune par M. Briand, qui les a priés d’agir à Rome pour y faire connaître la vérité et y faire prendre certaines déterminations. Il vaudrait encore mieux, à notre avis, que le gouvernement eût un représentant avoué auprès du Pape, auquel il pourrait alors faire tenir avec plus de sûreté le langage qu’il croirait opportun. Mais puisque nous sommes dans l’absurde, que nous nous obstinons à y rester, et que, en dépit de tant d’intérêts que nous avons à Rome, nous ne voulons avoir aucun organe pour les défendre, n’est-il pas inévitable que l’initiative privée se substitue à l’initiative gouvernementale, et qu’elle le fasse quelquefois d’une manière un peu désordonnée ? A qui la faute, s’il en est ainsi ? Pour’ ce qui est du Pape, comment se désintéresserait-il de ce qui se passe chez nous ? On peut être sûr qu’il ne le fera jamais. Il s’intéresse à ce qui se passe en Allemagne, en Amérique, partout : il fera de même en France, et nous ne méconnaissons pas qu’il y aura là une source abondante de difficultés pour l’avenir. C’est parce qu’il y en a eu beaucoup dans le passé et que, à dire vrai, notre histoire en est pleine depuis le commencement jusqu’à la fin, qu’on avait imaginé le système des concordats par lequel les deux pouvoirs se limitaient réciproquement, et se mettaient d’accord sur les droits qu’ils se reconnaissaient, aussi bien que sur la manière dont ils devaient les exercer. On a supprimé tout cela. Croit-on par hasard avoir supprimé du même coup les difficultés auxquelles le Concordat avait pourvu ? On s’est privé seulement des moyens qu’on avait de les résoudre. Les difficultés restent les mêmes, et on s’en apercevra de plus en plus. Il est probable que, en dehors de toutes les indiscrétions qu’on y relèvera, les papiers Montagnini poseront pour les esprits réfléchis le grave problème de savoir