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d’Églantine. Son attitude fut celle de l’indifférence, au témoignage de l’académicien Arnault, qui rencontra le lugubre cortège : « Il [Hérault] paraissait enfin détaché de la vie dont il avait acheté la conservation par tant de lâchetés et d’atrocités. L’aspect de cet égoïste étonnait tout le monde. »

M. Dard mentionne qu’Hérault relisait son Codicille en prison et y apportait des corrections. Nous regrettons de ne pas posséder ces retouches. C’eût été un document curieux que celui qui nous eût ; renseignés sur les dernières pensées de l’épicurien qui venait de parcourir une si rapide et si triste carrière : cet ironiste eut soin, même au bord de l’abîme, de ne rien livrer de son âme et de ne donner aucune marque de repentir qui pût modifier, en quoi que ce fût, son attitude de comédien. Hérault de Séchelles mérite d’être traité avec la même rigueur que son complice Danton, dont on a pu dire : « Si nous étions condamnés à l’admirer ou seulement à l’absoudre, il faudrait déchirer tous les codes, jeter au feu tous les livres de morale, retourner à l’état sauvage, avec l’innocence de moins et la corruption de plus. »

Nous souhaitons que cette courte notice suffise à montrer le réel intérêt du livre de M. Dard. On ne saurait trop louer la bonne méthode employée, qui consiste à situer le document dans un tableau pittoresque et à dissimuler ainsi l’effort que la recherche a coûté. Soyons donc reconnaissans à l’historien de nous avoir fait pénétrer dans l’intimité d’un des personnages les plus singuliers qui aient figuré sur la scène de la Révolution, et félicitons-le d’avoir réussi à fixer les traits de l’écrivain et de l’orateur dans un portrait d’une touche fine, élégante et légère.


R. V.


Le Secrétaire de la Rédaction, gérant,

JOSEPH BERTRAND.