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d’Ambohimanga-du-Sud, attelés à des charrettes d’oies, y font halte, mettant la volaille en liberté. Les oies grasses, en s’éparpillant, battent des ailes et prennent possession du village avec des fanfares de cris ; les petits enfans, tout nus, s’apprivoisent avec les bourjanes qu’on voit commérer à chaque seuil ; on entend partout le bruit sourd du calaou qui pile le riz des voyageurs ; une abondance inaccoutumée de fumée enveloppe le hameau ; et bientôt, d’une porte où sont assis, en un boucanage bleu, des ramaloas et des hommes, s’élèvent des chœurs qui se superposent clairement dans l’air doux du soir, comme les hymnes naïfs de l’hospitalité.


V. — LE PLATEAU CENTRAL ET LES DOVAS

Le Plateau Central, quadrilatère dont les lignes Est et Ouest s’allongent très droites, s’exhausse de tous côtés sur des talus à pic de plusieurs centaines de mètres, vraie « muraille continue à bastions et à brèches » qu’un système de failles entoure, en sorte de fossés, d’une ligne d’abîmes. C’est là que les Hovas, les plus avisés et ambitieux de tous les Malgaches, se sont retirés, fortifiés, multipliés, aguerris, pour en descendre ensuite, par incursions méthodiques, attaquer et soumettre les Sihanakas au Nord, les Betsimisarakes à l’Est, les Betsiléos au Sud et les Sakalaves à l’Ouest. L’intérieur même de leur Imerina (Emyrne) se creuse en une grande cuvette d’alluvions où s’étalait autrefois en lac l’Ikopa qui y serpente autour d’une éminence centrale, Tananarive, citadelle capitale.

Autour de Tananarive se groupent donc d’abondantes rizières, à la fois grenier d’alimentation et marécages de défense entre les replis du fleuve. Au-delà, une zone de plissemens bas au milieu desquels se tapissent des villages espacés, une population clairsemée : ce sont les glacis très étendus de la province de Tananarive. Contre la muraille de pourtour se distribuent circulairement toutes les autres provinces populeuses de l’Emyrne, marches gardant chacune une brèche en exploitant les rizières des fleuves qui y passent, colonies agricoles et militaires particulièrement nombreuses dans l’Ouest où la plupart des cours d’eau ouvrent des passages par lesquels montent les brigands sakalaves.

Celui qui entre sur le haut plateau est frappé d’abord par la