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Dans la Constitution canadienne, il est stipulé que le gouverneur général exerce ses fonctions « conformément à ses instructions. » Ces derniers mots ont été omis dans le texte de la Constitution du Commonwealth. On a jugé préférable d’enlever au chef nominal du pouvoir exécutif la faculté de s’abriter derrière des instructions venues du dehors. Celles qu’il reçoit du premier ministre fédéral doivent suffire. Au surplus, conformément aux fictions qui jouent un rôle si important, — et si heureux, — dans l’organisation officielle des pays anglais, il est entendu que ce ne sont là que des conseils ; seulement il faut les suivre : There is no compulsion, but y ou must, dit le policeman irlandais.

Cependant, aucune loi ne peut ê re promulguée sur le territoire d’une dépendance de l’Empire britannique sans avoir reçu l’assentiment royal. La faculté de donner cet1 assentiment ou de le réserver à l’examen du gouvernement britannique, appartient, en Australie, ainsi que dans toute colonie autonome, au gouverneur général. En pratique usuelle, il approuve toujours et immédiatement. Si toutefois la loi en question affecte directement les intérêts généraux de l’Empire ou paraît en désaccord avec les termes d’un traité international en vigueur, le gouverneur général prend l’avis des law officers of the crown avant de décider s’il y a lieu d’approuver ou d’en référer à Londres.

Même dans ce dernier cas, on peut considérer l’assentiment royal comme presque certainement acquis d’avance. Nous verrons, en examinant le fonctionnement de la Constitution, que le gouvernement de Sa Majesté, bien que prévoyant sans doute les difficultés qui résulteraient, soit avec des pays étrangers, soit avec l’Australie elle-même, de l’application de certaines lois, les a néanmoins approuvées. Il a mieux aimé s’exposer à ces ennuis que de prononcer un veto contre les décisions du Parlement de Melbourne. Quelquefois pourtant, s’il s’agit de mesures de grande importance ou de projets pouvant donner lieu à des conflits avec la loi britannique, le gouvernement de la mère patrie, sollicité ou non, intervient avant que les Chambres fédérales en aient terminé la discussion[1].

  1. C’est ce qui est arrivé pour le Navigation bill, proposé par le gouvernement fédéral au début de 1904, et dont l’application fut jugée absolument impraticable. Cette loi, heureusement pour le commerce de l’Australie, est encore à l’état de projet.