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de 1905, dans la sévérité qu’elle mérite et que nous lui avons nous-même témoignée. On ne veut voir aujourd’hui que ses défauts : n’a-t-elle pas aussi quelques qualités ? N’est-ce pas, à certains égards, une loi de délivrance dont on ne retrouverait pas au même degré les caractères dans celle de 1901 ? Si nous poussions plus loin le parallèle, on verrait que la plus favorable n’est pas la première en date. Mais à quoi bon ? Contentons-nous de répéter que la seule loi applicable à l’organisation du culte semble bien être la seconde. Si donc des organismes quelconques, — nous ne les appellerons pas des associations, — s’offrent à l’État et sont reconnus par lui au mois de décembre prochain, c’est à la condition qu’en n’y regardant pas de trop près, et en y mettant de la bonne volonté, il puisse croire que, vus du dehors, ils ressemblent assez à ceux de la loi de 1905 pour qu’il ait le droit de s’y tromper. Alors on vivra plus ou moins longtemps dans une équivoque acceptée de part et d’autre, mais que, de part et d’autre aussi, on pourra dissiper quand on voudra. Ce ne sera pas pour l’Église une situation forte ; nous en aurions préféré une autre. Mais il y a des circonstances où, sans sacrifier pourtant aucun de ses devoirs, il faut songer à vivre. N’en est-ce pas un aussi ?

Le moment n’est pas venu de supputer les chances plus ou moins prochaines ou lointaines d’un rapprochement entre la République française et le Saint-Siège. L’Encyclique, on le sait, contient, dans quelques-uns de ses passages, de véritables invites à ce rapprochement. L’opinion française, toujours un peu simpliste, n’y a rien vu de semblable au premier abord : au contraire, les journaux avancés ont crié tout de suite que le Pape nous déclarait la guerre. Mais la presque unanimité de la presse italienne en a jugé autrement, et les Italiens sont plus habitués que nous à lire entre les lignes des documens pontificaux. Nous n’hésitons d’ailleurs pas à croire et nous avons déjà dit que ce rapprochement s’opérerait tôt ou tard, d’une manière ou d’une autre. S’opérera-t-il précisément dans les conditions indiquées par l’Encyclique ? C’est peu probable ; mais la question regarde l’avenir et non pas le présent. Qu’on se reporte au passage du document pontifical que nous avons cité plus haut. Le Saint-Père y revendique ses droits immuables, ainsi que ceux des évêques, comme leur autorité sur les biens nécessaires à l’Église, particulièrement sur les édifices sacrés ; il exige que ces biens et ces édifices soient irrévocablement, dans les futures associations, en pleine sécurité. Si l’heure de l’entente était sur le point de sonner, quelques explications seraient ici nécessaires. Nous nous garderons bien de les