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Les deux Chambres ont nommé leurs commissions du budget. Le Sénat, où elle s’appelle commission des finances, a fait des choix qui, dans l’ensemble, sont excellons : il paraît résolu à soutenir le gouvernement dans l’œuvre, nécessairement médiocre, mais relativement modérée, qu’il a entreprise. En est-il de même de la Chambre des députés ? Peut-être ne faut-il pas donner à ses choix, non plus qu’à ceux de sa Commission du budget elle-même, une signification définitive : mais ils sont peu rassurans. La Commission a failli élire pour président M. Camille Pelletan : au troisième tour de scrutin elle s’est rabattue sur M. Berteaux. Elle a nommé rapporteur général M. Mougeot, qui ne paraît pas devoir être au-dessus de sa tâche. Quant à M. Berteaux, il est trop connu pour que nous ayons à parler de lui : il s’est déjà montré propre à beaucoup de choses. En prenant possession du fauteuil présidentiel, il a prononcé un discours qui contient peut-être la pensée encore confuse de la Commission. On y lit ce qui suit : « Vous estimerez, j’en suis sûr, que si notre devoir est toujours de dire toute la vérité, il nous commande aussi de ne pas exagérer les difficultés financières actuelles. » Cela veut dire que M. Poincaré les a exagérées, en quoi il a manqué à son devoir. « Nous aurons donc, a continué M. Berteaux, à rechercher, après tous les efforts de compression nécessaires, quelle part des dépenses extraordinaires de la Guerre incombe aux exercices antérieurs et quelle part ressortit au budget de 1907, pour ne lui faire supporter que celle-là. » Cela veut dire que M. Poincaré a eu tort d’imputer la charge sur un seul budget, au lieu de l’éparpiller entre plusieurs. « Nous pourrons même examiner, a poursuivi M. Berteaux, si, conformément à la plupart des précédens, des dépenses destinées à accroître, par des améliorations matérielles, notre force permanente, ne devraient pas être gagées sur des ressources spéciales. » Cela veut dire qu’il convient sans doute de refaire un budget extraordinaire de la Guerre. Et tout cela nous amène à nous demander s’il n’y a pas quelque excès d’ironie dans la phrase finale de M. Berteaux : « Je sais, d’avance, que la République peut compter à la fois sur le concours de chacun de vous et sur l’active et cordiale collaboration du gouvernement. » Soit ; mais le gouvernement, celui d’aujourd’hui du moins, peut-il compter sur l’active et cordiale collaboration de la Commission du budget ? Sur tous les points essentiels de son programme, M. Berteaux a pris une attitude contraire à celle de M. Poincaré. Que fera la Chambre elle-même ? Nous le saurons bientôt, peut-être même avant les vacances, quoiqu’elles soient imminentes. On annonce en effet que