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avaient infligé une rude défaite, dont celui-ci ne sut heureusement pas profiter pour descendre jusqu’au Saint-Laurent ; le roi d’Angleterre n’en honora pas moins sa victoire en lui décernant le titre de baronnet, et la Chambre des Communes, suivant une tradition toujours en vigueur de l’autre côté de la Manche, lui vota une dotation de 5 000 livres sterling. C’est alors pour la dernière fois, que la France envoie des renforts au Canada : Montcalm, avec le titre de maréchal de camp, arrive à Québec au mois de mai 1756 ; en comptant les compagnies venues avec lui, il dispose d’environ 4 000 hommes de troupes réglées, plus 5 à 600 soldats de marine ; quant aux milices canadiennes, qui comprennent tous les hommes valides de quinze à soixante ans, elles peuvent donner au maximum 14 000 combattans. Or, en 1756, les colonies de la Nouvelle-Angleterre avaient sous les armes plus de 25 000 hommes ; il leur était facile d’en trouver deux ou trois fois plus, dans leur propre population et, cette fois, Pitt ayant pris le pouvoir en Angleterre, la métropole allait intervenir énergiquement pour aider les Américains ; la partie n’était donc pas égale. Dès 1758, le Canada français trouvera en ligne contre lui plus de soldats qu’il n’a d’habitans, femmes et enfans compris.

Un court résumé d’ensemble des campagnes de 1756 à 1760 est nécessaire pour l’intelligence facile des détails concernant plus particulièrement l’une d’entre elles, celle de la prise de Québec (1759). Dans l’été de 1756, des soldats et des miliciens, sous les ordres de Montcalm, enlèvent aux Anglais le fort Oswego, sur la rive droite du lac Ontario. En 1757, les colonies de la Nouvelle-Angleterre dessinent sur Louisbourg (Ile Royale) un mouvement vite arrêté ; Montcalm éloigne encore une fois les Américains du lac Champlain, par la prise et la destruction du fort William-Henry. La campagne de 1758 nous est partiellement favorable mais, tandis que les forces considérables des Américains sont dispersées à la bataille de Carillon, près du lac Champlain, nos adversaires remportent, en marge de nos principaux établissemens, des succès qui restreignent de plus en plus le champ de bataille ; le Canada se voit décidément coupé de la métropole par la chute de Louisbourg, de la Louisiane par la destruction du fort Duquesne, que brûlent ses défenseurs en retraite, du haut pays des Lacs, enfin, par la prise du fort Frontenac qui compense, et bien au-delà, les avantages de Montcalm à Oswego. Fin 1758, le Canada français est réduit aux deux rives du Saint-Laurent, de Montréal à