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humanité plus fortunée que la nôtre retrouvera enfin cet équilibre moral et cette vivante unité de vie spirituelle que nous souffrons surtout d’avoir perdus.

À cette œuvre de rénovation intellectuelle et morale, à cette refonte de la mentalité catholique, nulle part, nous l’avons dit, à l’heure actuelle, on ne travaille plus résolument et plus activement qu’en France. En philosophie, en histoire, en apologétique, des voies nouvelles ont été tentées, ou plutôt, et plus exactement, des traditions fâcheusement oubliées ont été ressaisies et reprises ; des efforts ont été faits, des travaux, ont été publiés qui se sont imposés à l’attention des plus prévenus d’entre les incroyans. Les ouvriers de ce mouvement sont trop généreux et trop vraiment chrétiens pour ne pas oublier les suspicions, les dénonciations, les inintelligences et même les injures dont ils ont été l’objet de la part de ceux-là mêmes qu’ils voulaient servir. Ils n’ont qu’à persévérer dans la voie qu’ils ont ouverte. Déjà les initiatives individuelles, déjà les sillons parallèles se rapprochent ; déjà les points de convergence se multiplient à l’horizon. On commence à entrevoir le moment où ces tendances communes viendront se grouper et se fondre dans une œuvre d’harmonieuse et puissante synthèse. Il faut souhaiter, pour le bien du pays, pour l’avenir général du catholicisme, que cette œuvre se réalise, que ce Génie du Christianisme adapté aux besoins de notre temps trouve un écrivain de forte pensée, de savoir et de talent pour récrire. Ce jour-là, l’anticléricalisme doctrinal aura vécu.


VICTOR GIRAUD.