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applaudirait Paternoy quand il se déclare prêt à sauver José León s’il reconnaît qu’il n’y a de mal que dans le mensonge. Et quand José León s’y décide, la scène de son aveu ne rappelle-t-elle pas la confession bien connue de la Puissance des ténèbres ?

L’insuccès de son drame a rendu à M. Galdós le service de le mettre en garde contre les dangers du symbolisme. Il n’était pas homme à se laisser décourager ni à renoncer à la conception qu’il se faisait du théâtre. Il comprit seulement qu’il lui faudrait désormais accorder plus d’importance à l’action et aux personnages. Puisque son public ne se laissait point émouvoir par l’exposition et la discussion de thèses générales, il allait s’adresser plus directement à lui.


III

Dans les pièces de sa première manière, M. Galdós avait plus d’une fois essayé de faire sentir l’intérêt spécial qu’en deçà des Pyrénées, on devait prendre à des idées d’apparence ou d’origine étrangère. Il avait même laissé transparaître des allusions à un état d’esprit et de choses purement espagnol. Ces questions, que M. Galdós n’avait posées qu’en passant, vont se préciser et, pour ainsi dire, se nationaliser dans les drames de la seconde manière.

C’est la question économique qui est traitée dans Volonté. Par sa bonté et son insouciance, don Isidro Berdejo a laissé péricliter son commerce. Sa femme se désole, mais ne sait guère que se désoler et prier. Sa fille cadette Trinita ne songe qu’à ses toilettes et à son piano. Son fils Serafinito se pique d’éloquence dans les cercles juvéniles et se ruine en livres de sociologie et d’anthropologie. La maison est sur le point de s’effondrer. Il faut un miracle pour la sauver. Ce miracle est accompli par une volonté, celle d’Isidora. Isidora était la fille aînée de la famille, et elle semblait la raison même lorsqu’en un jour de folie, elle s’est éprise d’un Alejandro Hermann, qui représente dans la pièce la fantaisie, l’art, le mépris du travail quotidien et du mariage régulier. Elle a vécu quelque temps avec lui ; mais, lasse de lutter contre ses exaltations, elle a retrouvé son courage et elle revient exercer chez elle son activité bienfaisante. Elle impose à sa sœur le soin de la cuisine, à son frère le souci des écritures commerciales, et, par son despotisme séduisant, elle remet