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quelquefois produites jusque dans les polémiques françaises. On a parlé d’un mandat européen que l’Espagne et nous, aurions reçu : on a parlé de police franco-espagnole. Nous n’avons reçu aucun mandat dont nous devions compte à l’Europe : nous avons été seulement autorisés, et l’Espagne l’a été avec nous, à mettre une poignée d’officiers et de sous-officiers au service du Sultan. Il n’y a pas de police franco-espagnole, mais seulement une police chérifienne. L’inspecteur général doit être, lui aussi un fonctionnaire marocain : il est mis à la disposition du Sultan pour inspecter sa police, comme les autres y sont mis pour l’organiser. Ce n’est donc pas au corps diplomatique qu’il doit adresser ses rapports, c’est au Sultan. La logique le veut ainsi ; mais nous ne la pousserons pas à l’extrême : il arrive bien rarement qu’elle régisse jusqu’au bout les choses humaines. L’inspecteur général, quoique nommé par le Sultan et indépendant du corps diplomatique, aura avec ce dernier des rapports dont le plénipotentiaire américain, M. White, a trouvé la formule, et l’Allemagne, en obtenant cette satisfaction, peut se flatter d’avoir fait consacrer indirectement ce principe de Tinter nationalisation qui lui est si cher. La Banque d’État, elle, sera vraiment internationale : c’est une conséquence du principe de la porte ouverte qui s’applique aux capitaux comme aux autres marchandises. Mais, là encore, notre situation privilégiée est reconnue puisque nous avons trois parts dans la constitution du capital social alors que les autres puissances n’en ont qu’une. Le double but que nous nous proposions a donc été atteint : nous restons un peu hors de pair au Maroc, et l’avenir y est complètement réservé.

Nous devons une grande reconnaissance aux puissances dont le concours nous a permis de défendre utilement nos intérêts et nos droits, l’Angleterre, la Russie, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, les petites puissances du Nord. Nous en devons aussi à l’Autriche qui, tout en se rangeant du côté de l’Allemagne, a toujours cherché et finalement trouvé les transactions qui pouvaient servir à l’entente définitive. L’opinion allemande, à en juger du moins par les articles de certains journaux, a éprouvé de l’irritation contre quelques-unes de ces puissances ; mais il est probable que le gouvernement impérial savait mieux que les journaux à quoi s’en tenir sur leurs dispositions. L’Italie fait partie de la triple alliance et elle lui est très fidèle ; toutefois, si elle a pris des engagemens en ce qui concerne la Méditerranée, c’est avec l’Angleterre et avec nous plutôt qu’avec l’Allemagne. Quant à la Russie, son cas est différent, mais son indépendance n’est