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Tes pleurs arrêteront la foudre menaçante,
Comme fit autrefois Ninive gémissante.
Mais si, comme Nadab[1], oubliant ton devoir,
D’un sacrilège feu tu souilles l’encensoir,
Si du traître Mathan[2]renouvelant l’exemple[3],
Infidèle à ton Dieu, déserteur de son temple[4],
Tu présente à Baal[5] un encens criminel,
Ou si, par des conseils[6] dignes d’Achitophel,
Tu détournes ton roi du sentier[7] légitime,
Le même châtiment suivra le même crime,
Et dans le vaste abîme aux méchans préparé
Tu rejoindras Mathan, Abiron et Choré[8]. »

Ainsi parle le saint, et Fleury qui l’écoute
Le voyant remonter dans la céleste voûte,
Dans les troubles divers dont il est travaillé,
Doute s’il dort encore, ou s’il est éveillé.


ODE SUR LES MATIÈRES DU TEMPS (1728)


[en marge : Voltaire poète auteur de cet (sic) ode]


Après que l’Église romaine
Se vit maîtresse souveraine[9]
De la demeure des Césars,
Par leur aveuglement, par sa fourbe sacrée
Elle crut ajouter à sa riche contrée[10]
Tout ce qu’ils possédaient par le secours de Mars.

Alors en luxe monarchique
De l’indigence apostolique
On vit l’énorme changement ;
Et, foulant à ses pieds tous les rois de la terre,
On vit les cheveux blancs du successeur de Pierre
D’une triple couronne emprunter l’ornement.

  1. Var. comme l’hinée.
  2. Prêtre de Baal, IV Reg. c. II, v. 18 ; note du ms.
  3. Var. suivant le noir exemple.
  4. Var. Du véritable Dieu tu désertes le temple.
  5. Var. Pour offrir à Baal.
  6. Var. par des conseils.
  7. Var. du centre.
  8. Var. Tu joindras Abiron, Dathan avec Coré.
  9. Var. maîtresse et souveraine.
  10. Var. par ses fourbes sacrées, — à ses riches contrées.