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le lendemain probable. Aussi M. Rouvier s’est-il mis à la disposition de la Chambre pour lui fournir des indications plus complètes et en tout cas plus actuelles, au moment où seront discutés les douzièmes provisoires, c’est-à-dire avant la séparation du Parlement. Celle séparation se produira dans très peu de jours, puisque la campagne électorale pour le renouvellement d’un tiers du Sénat est déjà commencée. Nous sommes convaincus que notre ministre des Affaires étrangères n’aura aucune peine à répondre à la thèse, un peu laborieusement construite, de M. le prince de Bülow et que, le passé restant ce qu’il est puisque personne ne peut le changer, ses explications rassureront l’Allemagne sur l’avenir, — si elle consent toutefois à être rassurée.


Deux crises ministérielles viennent de se produire, l’une à Londres, l’autre à Madrid. Ni l’une ni l’autre ne sauraient nous surprendre, et encore moins nous inquiéter. Elles ne sauraient nous surprendre puisque nous annoncions, il y a quinze jours, comme prochaine la démission de M. Balfour et de ses collègues, et que, dès le premier moment, nous avions signalé dans le cabinet Montero Rios le défaut qui ne lui permettrait probablement pas d’être durable.

Le parti libéral en Angleterre était au pouvoir depuis si longtemps qu’il a fini par s’user un peu : c’est le sort commun à tous les partis et à tous les ministères ! Quant aux libéraux espagnols, ils ne sont aux affaires que depuis quelques mois ; aussi ne sont-ils pas usés du tout ; mais la plupart de leurs chefs, — hélas ! ils en ont beaucoup, — se sont refusés, à tort ou à raison, à faire partie du ministère avant et même immédiatement après les élections, et M. Montero Rios, qui a fait preuve, en cela, de la plus honorable bonne volonté, a dû se résigner à faire un cabinet qui ne pouvait être qu’un cabinet d’attente, puisque les hommes les plus importans du parti libéral étaient restés en dehors, attendant leur heure et prêts à en profiter. M. Montero Rios sentait mieux que personne l’instabilité de la combinaison qu’il avait formée par dévouement. Lorsque des troubles se sont produits à Barcelone et qu’il a dû y proclamer l’état de siège, il a offert au Roi sa démission à plusieurs reprises et avec insistance. Il ne se sentait pas dans l’abandon où on l’avait laissé, la force de dominer une situation devenue difficile, peut-être périlleuse. Finalement, le Roi a accepté sa démission, et a confié le soin de former un nouveau cabinet à M. Moret, l’homme qui était, dans les circonstances actuelles, le plus qualifié pour cela. M. Moret est trop connu, il a déjà joué en Espagne un rôle trop considérable pour qu’il soit