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dans le Sud-Ouest des États-Unis des salaires meilleurs que dans leur pays ; ils se font cowboys, ou travaillent dans les planta-lions de coton du Texas, ou viennent retrouver, au Nouveau-Mexique, leurs anciens compatriotes que les Etats-Unis ont annexés en 1848, mais qui ont conservé les coutumes et la langue espagnole en même temps que la religion catholique.

L’excès de l’émigration sur l’immigration est assurément un mal pour un pays dont l’ensemble contient à peine 7 habitans au kilomètre carré et qui, même en mettant à part les provinces à demi désertiques du Nord : Sonora, Chihuahua, Coahuila, la Basse-Californie et l’appendice peu habité du Yucatan, c’est-à-dire près de la moitié du territoire, n’atteint encore qu’une densité de 12. Il ne peut compter pour se peupler que sur l’excédent des naissances relativement aux décès. La comparaison des deux recensemens de 1895 et de 1900 qui ont accusé, le premier 12 632 000, le second 13 611 000 habitans, fait ressortir un gain moyen annuel de près de 200 000 âmes, soit 7 1/2 pour 100 de la population, ce qui est une proportion très satisfaisante en soi et indique une très forte natalité, car la mortalité doit être considérable dans un pays où les règles de l’hygiène ne sont guère observées ni même connues, où la richesse est médiocre, et dont ‘es régions côtières sont fort peu saines. Les gens des provinces les plus peuplées vont coloniser peu à peu celles qui le sont le moins, car on observe que ce sont ces dernières qui gagnent le plus grand nombre d’habitans. En dépit de cette « auto-colonisation » favorisée par le gouvernement, le Mexique aurait grand besoin de colons venus du dehors et les accueillerait à bras ouverts ; l’État leur concède de grands avantages, leur offre des terres fertiles aux conditions les plus favorables. Le climat des terres froides et même des terres tempérées convient d’ailleurs très bien aux Européens du Midi ; le Mexique n’est pas plus éloigné de l’Europe que l’Argentine ou le Sud du Brésil, il l’est même moins. Malgré tout, les colons ne viennent pas.

On peut découvrir deux causes de leur abstention. Un demi-siècle de guerres civiles ont fait au pays un mauvais renom, qu’il est difficile d’effacer, et, surtout, la présence d’une nombreuse population indigène écarte les immigrans, comme la présence des noirs les éloigne en grande partie du Sud des États-Unis. Tous les hommes ont une répugnance instinctive pour le contact d’hommes d’autres races, surtout quand ils estiment