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Grands-Lacs pour le prompt chargement et le prompt déchargement des cargaisons.

En somme, le système reposait sur la masse et sur le peu de variété des exportations américaines. Il a été poussé plus loin, et nous trouvons, dans les dépositions recueillies par la Commission, l’idée de donner une prime d’exportation à un seul genre de fret, le charbon.

C’est M. E. R. Wood, président d’un comité spécial constitué au ministère du Commerce, qui s’est fait le champion de cette idée ; il l’a défendue avec beaucoup d’habileté[1]. Toute la question, dit-il, se résume à ceci : Il faut assurer à l’armement américain un fonds de chargement qu’il puisse prendre à bon marché (a cheap initial cargo). Or, si vous considérez l’ensemble des transports par mer dans le monde, vous constatez que sur 200 millions de tonnes environ, il y a 65 millions de tonnes de charbon. Si vous déduisez du total des marchandises chargées celles que leur nature destine aux navires rapides, vous verrez que le charbon forme sensiblement la moitié de la masse des cargaisons lourdes, de celles que transportent les cargo-boats. Voilà pourquoi l’Angleterre tient dans le commerce maritime une place si éminente. Elle charge chaque année 60 millions de tonnes de charbon sur navires. Nous aussi, nous avons du charbon, et nous le donnerions volontiers à 11 fr. 50 la tonne, chargé à bord, tandis que les Anglais vendent le leur aujourd’hui environ 17 fr. 50[2]. Seulement, on nous prend 15 shillings pour l’amener par exemple à Marseille, tandis que de Cardiff ou de Newcastle, le fret est de 5 shillings. Donnez-nous une prime d’exportation qui comble l’écart, vous assurerez un énorme développement à nos mines et un magnifique essor à notre marine marchande.

Cependant le système des primes à l’exportation n’a pas été adopté par la Commission. Elle a considéré avec raison qu’elle avait pour mission de relever directement et promptement la marine marchande, non de favoriser telle ou telle branche de l’activité nationale, déjà fortement protégée. D’autre part, en liant aussi intimement l’exportation américaine à une marine nationale encore si faible, on aurait risqué de compromettre les intérêts qu’on voulait satisfaire. Le commerce maritime des

  1. Hearings, t. I, p. 327 à 333.
  2. La déposition de M. E. R. Wood est du 26 mai 1904.