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abondance. Les autres sortes de marchandises ne figurent que pour un faible contingent.

Ainsi débarrassée par la concurrence du chemin de fer de la plupart des marchandises variées, légères et divisées, la navigation des Lacs a pu se spécialiser dans le transport du charbon, du minerai, des grains et des bois. Les navires ont été construits en vue de ce fret ; les quais ont été puissamment outillés pour le charger et le décharger, et c’est grâce à des installations affectées spécialement au charbon, au minerai, aux grains, aux bois, que les navires séjournent si peu dans les ports.

La navigation maritime au long cours ne saurait atteindre le même degré de spécialisation. Il faut, en effet, qu’elle transporte toutes sortes de marchandises, puisqu’elle est seule à pouvoir leur faire franchir l’Océan. Toutefois, à côté des navires qui chargent des cargaisons variées, il y a place pour d’autres navires affectés au transport des grains ou des charbons, par exemple. En tous pays, et dès aujourd’hui, les voiliers long-courriers sont généralement affrétés pour une seule nature de cargaison : nitrates, pétroles, grains, minerais, charbon, bois, phosphates, cimens, jute, etc. D’autre part, les ports maritimes les mieux organisés, soit aux États-Unis, soit en Europe, sont arrivés déjà aussi à spécialiser certains de leurs quais, à les outiller pour la manutention d’une marchandise déterminée. Il y a de grands progrès possibles dans cette direction. Les armateurs américains sont donc autorisés à soutenir que, si une protection efficace leur était accordée dans le domaine de la navigation de concurrence, ils pourraient y appliquer les procédés si ingénieusement créés par leur initiative dans le domaine réservé du cabotage et de la navigation sur les Grands-Lacs. C’est là un des thèmes habituels dont s’inspirent la plupart de leurs dépositions devant la Commission.

Il est vrai que leurs succès sur les Grands-Lacs ont, été favorisés par la masse énorme du trafic qui s’y opère. En 1902, le canal de Soo, qui met en communication le Lac Supérieur avec les autres Grands-Lacs, a livré passage à 36 millions de tonnes de marchandises, soit environ deux fois le total relevé au compte du port de Hambourg. Le tonnage des navires ayant transité par ce canal au cours de la même année 1902 a atteint près de 32 millions de tonneaux de jauge (31 955 582)[1]. Le tonnage

  1. Hearings, t. II, p. 737.