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absolu. La reconnaissance de ce droit ne saurait nous amener, encore moins nous obliger à renoncer à un autre. Nos droits sont partout à la mesure, de nos intérêts légitimes. Ici encore, nous nous reportons à l’accord du 8 juillet, dont les termes sont notre Evangile politique. Il reconnaît l’intérêt « spécial » que nous avons à ce que l’ordre règne dans l’Empire du maghzen. Le mot « spécial » y est en toutes lettres, et il caractérise l’intérêt que nous avons au maintien de l’ordre, non plus seulement sur la frontière, mais dans tout le Maroc. Nous ne pouvons donc renoncer à rien sur un point quelconque de l’Empire chérifien, et personne ne peut nous demander de le faire, — l’Allemagne moins que personne, puisqu’elle a signé avec nous l’accord du 8 juillet. Ces velléités n’ont d’ailleurs pas laissé de traces dans l’arrangement final du 28 septembre.

En défendant notre droit, nous avons défendu celui de la conférence. On le sait, nous n’avons pas désiré la conférence ; nous ne l’avons pas provoquée ; mais, quand nous l’avons acceptée, nous l’avons fait 1res loyalement. Nous entendons par là que, sous la réserve formelle des principes si souvent énumérés et que nous venons de rappeler une fois de plus, la conférence est libre, et que chacun, en y entrant, conserve sa pleine liberté. Si les négociations entre la France et l’Allemagne ont duré trop longtemps, c’est parce qu’on a voulu faire, au moins en partie, l’œuvre de la conférence. On s’est finalement borné, conformément à la déclaration annexe du 8 juillet, à déterminer les conseils que les représentans des deux puissances devaient donner au Sultan en vue de la fixation du programme qu’il proposerait aux délibérations des puissances. Que ne s’en est-on toujours tenu strictement là ? On se serait épargné bien des embarras. Il s’agissait, à l’origine, de donner quelques conseils au Sultan, et, peu à peu, à la suite de nous ne savons quelle déviation, on s’est laissé entraîner à faire entre soi des accords nombreux et précis dont le moindre défaut était d’être inutiles. Dieu sait toute l’ingéniosité que M. le docteur Rosen et M. Révoil ont dépensée dans cette tâche ! Et ils n’ont pas pu s’entendre ! L’affaire a été portée à Berlin, où elle s’est heureusement dénouée entre le prince de Bülow et M. Bihourd. Nous avons pu enfin respirer.

Le Maroc, malgré tout le mal que l’Allemagne se donne pour lui, est d’un si faible intérêt pour elle, qu’il faut bien chercher ailleurs les causes déterminantes de son effort. L’ayant déjà fait, nous nous bornerons aujourd’hui à indiquer brièvement les liens qui rattachent la question marocaine à la situation générale actuelle.