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Tel un larron pris en fraude,
C’est le vent amer qui rôde
Et s’enfuit ;
Qui, partout insaisissable,
Frôle les grèves de sable
Et de nuit.

O vent, que tes cris sont rauques,
Quand deviennent les flots glauques
Belliqueux !
Arrondissant leurs volutes,
Vent maudit, comme tu luttes
Avec eux !

Modèle un poitrail d’écume.
Fais avec l’embrun qui fume
Des naseaux.
Ton coursier d’apocalypse
Au moindre obstacle s’éclipse
Sous les eaux.

Creuse des ravins. Élève
Des montagnes. Peine et rêve
Superflus !
Par toi-même nivelées,
Les cimes et les vallées
Ne sont plus.

Crée, invente des chimères ;
Tes œuvres sont éphémères.
Décevant
Est l’effort de ton génie,
Et la Nature te nie,
Triste vent.

A l’horizon clair ou pâle,
Ce qu’ébauche un souffle, un râle
Le détruit ;
Et de ton labeur funeste,
O vent du large, il ne reste
Qu’un vain bruit.