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de rappeler des faits plus concluans encore et que nous connaissons bien[1].

« A Paris, M. Mamoz offre à 727 mendians une occupation payée 4 francs par jour : 552 refusent net, 37 travaillent une demi-journée ; 68 ont le courage de demeurer jusqu’au soir, 51 travaillent deux jours. Le troisième jour, il en restait 18.

« M. Robin confirme l’expérience de M. Mamoz. Sur 700 mendians en état de travailler, il découvre 11 hommes de bonne volonté prêts à accepter une besogne régulière. »

Passons chez les Allemands, et au témoignage des Belges ajoutons celui que notre compatriote, M. Louis Rivière, est allé recueillir l’an dernier en pays germanique. Quand le promoteur des stations de secours et des colonies ouvrières annonça pour la première fois qu’il continuerait bien de donner au pauvre passant de la soupe, du pain et des vêtemens, mais que tout individu valide devrait gagner ce secours en travaillant une heure à casser des pierres ; alors « le nombre des quémandeurs diminua immédiatement des quatre cinquièmes. »

Revenons chez nous et demandons-nous si de nouvelles expériences mieux préparées ou mieux gouvernées peut-être n’ont pas eu plus de succès.

Parmi les documens qui s’offrent à moi, voici le plus récent, à ma connaissance du moins. Il est du 19 juin 1903, et il tombe sous mes yeux dès le premier jour que je passe, au cours de ce même été, dans mon département d’origine. J’ouvre, en effet, un des journaux du chef-lieu, et je lis :

« La Préfecture nous communique la note suivante :

« L’œuvre de l’assistance par le travail porte à la connaissance du public que, depuis l’ouverture de son établissement (rue des Moreaux, 22, à Auxerre), une certaine quantité d’indigens, passans, ouvriers soi-disant sans travail, tous valides, se sont présentés pour obtenir des secours, mais se sont refusés au travail extrêmement simple et peu fatigant qui leur était proposé, préférant continuer à mendier de porte en porte.

« L’œuvre d’assistance croit devoir mettre en garde la population contre les sollicitations des professionnels de la mendicité, et l’engager, dans l’intérêt général, à les adresser systématiquement, soit au bureau de police, soit à l’établissement de la rue

  1. Voyez ouvrage cité, p. 383.