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proches de l’Orient par leur littoral, plus parentes par leur climat, leur race, leur histoire, dans l’ancienne Grande-Grèce, l’hellénisation, à ce moment, ait été plus profonde ? Par les mêmes raisons, dans toutes les périodes suivantes, depuis le Ve jusqu’au XIe siècle, cette hellénisation s’y verra, plus fréquemment et plus aisément, renouvelée et ranimée, soit par les reprises militaires et administratives de l’empire byzantin sur un territoire dont il restait le suzerain légal, soit par les importations pacifiques dues à la propagande ecclésiastique et à l’activité commerciale des villes maritimes échelonnées, tout le long de ses côtes, devant les trois mers. Il va sans dire que, suivant leurs nécessités topographiques et leurs aventures politiques, les diverses parties de cette immense région, très accidentée, très inégale, recherchent ou subissent ces influences extérieures avec plus ou moins de suite ou de résultats. Naples, la vieille Parthénope (la Sirène), le centre hellénique le plus vivant sous l’Empire, eut la bonne fortune de garder longtemps son prestige. Les Goths la respectèrent, les Byzantins la protégèrent, les ducs qui la gouvernèrent, depuis la chute de l’Exarchat, protégés par ses fortes murailles, sauvegardèrent son indépendance jusqu’à l’occupation normande, au XIe siècle, c’est-à-dire durant les crises les plus terribles, où sombra l’antique splendeur dans tout le reste de l’Italie. Les jardins fertiles de la Campanie voluptueuse, les plaines et les ports ouverts de l’Apulie, les montagnes accidentées ou sauvages des Abruzzes et de Calabre, plus ou moins exposées ou résistantes aux invasions et incursions barbares, aux occupations étrangères, aux pénétrations intérieures, n’eurent point, par malheur, d’aussi heureuses destinées. Toutes ces contrées, d’ailleurs, avaient été si profondément assimilées par la centralisation romaine et si abondamment couvertes de temples, basiliques, palais, thermes, etc., en style officiel, par les artistes de l’empire, que les édifices antiques et païens y devaient partout suffire pendant longtemps, presque jusqu’à nos jours, à fournir les premiers matériaux, comme les inspirations essentielles, aux architectes, sculpteurs et peintres chrétiens du moyen âge.

A Naples, dès l’origine, dans les Catacombes de San Gennaro, quelques débris de fresques nous révèlent, chez les premiers chrétiens, cette même fraîcheur de rêve qui sourit, à Rome, aux plafonds fleuris de Sainte-Priscilla. Les réminiscences de la décoration alexandrine, si brillante et si abondante alors dans la