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salles fraîches, — au dehors la température est sénégalienne. — ~ Quelques étudians causent, groupés. Je me trouve engagée dans un vestibule, puis une cour, ou plutôt dans ce qui a dû être une cour, car elle est remplie ou à peu près par une série de bâtimens en bois montés sur assises de brique, qui me rappellent assez nos hôpitaux « provisoires » de Broussais ou de Baudelocque. On y a organisé des salles de médecine et, du dehors, l’on peut juger qu’elles sont combles. Dans les parties de la cour restées libres, quelques malades sont venus respirer.

Un perron, et je suis enfin dans l’hôpital proprement dit, dans les services généraux. Au rez-de-chaussée, « Matron’s office, » les bureaux de la direction. Dans une première pièce, un petit groupe d’infirmières est tout occupé à déballer de grands paniers de fleurs. Par bottes, par brassées, les roses, les œillets, tout le parfum de juin se répand dans la salle. On fait des lots pour chaque service et, telles des fourmis en récolte, chaque nurse en charge emporte son butin.

J’ai demandé la directrice. Une charmante « sister » par le aussitôt dans un tube acoustique et l’on m’admet auprès de miss Liickes, la doyenne vénérée des « matrons » londonaises, une autre miss Nightingale, moins la difficulté des débuts. Ses avis sont sollicités et appréciés, ses ouvrages lus dans tous les hôpitaux anglais. Avec la plus cordiale amabilité, elle me les offre[1]. L’un de ces volumes a été traduit en français[2].

Tout en causant, nous attendons sir S. H…, le très dévoué président du comité de l’hôpital. Son rôle ici est important et, d’accord avec miss Lückes, il veille sans cesse à doter le « London » des plus neuves améliorations. Le voici, et nous parcourons ensemble les services. Il fait bon voir les sourires francs qui viennent éclairer les visages, au passage de celui qui contribue si fort au bien-être de tous, personnel ou malades. Dans leurs rapports, l’humour anglais joue son grand rôle, innocent moyen de faire accepter les petites observations.

Sur le mur d’un vestibule, je remarque un tableau chargé d’inscriptions mobiles : avis aux nurses, annonces de cours ou d’examens, postes vacans, et cette bizarre mention sur une feuille : Breakages, objets cassés pendant le mois… Suivent des chiffres faisant face à l’énumération, non pas du genre d’objets,

  1. General Nursing. Hospital Sisters and theit duties, by Eva L. E. Lückes.
  2. Manuel de la garde-malade. Vigot, 1904.