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souvent plus dangereux qu’utile, » suivant la remarque de l’excellente Mme de Lamartine, — elle avait de l’agrément, un « extérieur gracieux » que faisait valoir un léger cachet d’exotisme, dans un temps où le genre anglais était à la mode. Il suffisait au surplus que cet extérieur ne détruisît pas le charme très pénétrant et la très réelle séduction de son esprit. Lamartine fut tout de suite frappé de la conformité qu’il trouvait entre les goûts de la jeune fille et les siens. Elle aimait la poésie, la nature, la rêverie mélancolique. Très instruite, musicienne et peintre, elle avait sinon le talent, du moins l’intelligence artistique. Ajoutez une parfaite simplicité, une modestie qui n’était pas étudiée, je ne sais quoi d’effacé qu’il fallait découvrir et qu’on n’oubliait plus, une fermeté de caractère qui s’alliait à beaucoup de douceur ; la maturité de son esprit, — elle avait vingt-neuf ans, — était déjà d’une femme. C’était la compagne désirée. Lamartine la rencontrait à l’instant précis où il la cherchait. Le voisinage dans une ville d’eaux, la fraîcheur et l’enchantement d’un beau cadre de nature firent le reste.

Quand il arriva, Lamartine trouva les dames Birch installées à Aix avec la marquise de la Pierre et ses filles. Elles habitaient chez un certain M. Perret, qui était un « respectable vieillard, » un « saint homme, » un botaniste et un musicien, et qui joignait à toutes ces qualités celle d’être un hôtelier complaisant. Est-il exact, comme l’a conté Lamartine, qu’il lui ménageât des entrevues avec la jeune Anglaise, en l’avertissant par un air de flûte, chaque fois que « la mère vigilante sortait sans sa fille pour la promenade ? » Ce qui est certain, c’est qu’il servait d’intermédiaire aux deux jeunes gens pour leur correspondance secrète.


LA DÉCLARATION

La première en date, — la plus chère peut-être, — de ces reliques d’amour est un carré de papier sur lequel se lisent ces mots : Alphonse, Aix, 14 août 1819, et qui contient dans ses plis une fleur séchée. C’était le premier aveu d’un sentiment auquel il ne manquait plus que le mot qui l’exprime. Aussi la jeune fille dut-elle être plus émue que surprise, quand elle reçut cette lettre à l’adresse mystérieusement libellée : Pour remettre à la personne, et qui était une déclaration en forme :