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novembre 1904, un article de l’Écho de Chine, qui n’est malheureusement pas le seul dans son genre, et dont voici un passage : « L’intérêt de l’Europe n’est pas de favoriser ces jeunes rebelles qui s’appuieront sur le Japon pour nous créer des difficultés, nous évincer et enfin nous mettre en présence d’une Chine régénérée et dangereuse ; nous devons soutenir l’Impératrice contre les tentatives révolutionnaires, conserver le vieil Empire vermoulu à l’apathie duquel nous devons de pouvoir vivre chez lui. » On comprend tout le parti que les réformateurs et les révolutionnaires peuvent tirer de semblables maladresses. La Chine n’est plus et sera demain moins que jamais, une « quantité négligeable ; » nos publicistes, en Extrême-Orient et même en France, ne devraient pas l’oublier.

Le gouvernement de l’Impératrice, ballotté entre la conscience qu’il a de la nécessité des réformes et la crainte d’une révolution qui renverserait la dynastie, entouré d’ailleurs d’agens japonais, tantôt se jette dans le courant réformiste" ; tantôt recourt à des répressions maladroites ; la mort, sous le bâton, du journaliste Chen-Tsin, en 1902, montra combien les vieilles lois et les vieilles mœurs devenaient incompatibles avec le régime moderne ; une si cruelle répression est devenue impossible ; le gouvernement se contente de sévir çà et là, lorsque des révolutionnaires se laissent entraîner jusqu’aux actes. A la fin de l’année 1904, le taotaï de Chang-hai fut informé qu’une société pour la Révolution dans une haine commune, constituée au Japon par des étudians chinois, répandait des billets d’affiliation portant les mots « rénovation de la Chine ; » le jour était déjà fixé pour un soulèvement général ; plusieurs des meneurs, arrêtés, furent décapités ; parmi ceux qui purent s’enfuir, deux étaient d’anciens étudians du Japon devenus professeurs dans des écoles chinoises. Mais, c’est au Japon même, dans le milieu turbulent des jeunes Chinois, qu’il faudrait exercer une surveillance : le gouvernement l’a essayé. En 1902, les étudians s’étaient montrés si agités que le ministre de Chine à Tokio tenta de leur imposer des règlemens plus stricts : il n’en fallut pas davantage pour soulever une véritable émeute ; les jeunes gens allèrent en bandes manifester devant la légation et menacer le ministre. Le gouvernement de Pékin s’émut et le fils du prince Tsing, qui revenait alors d’Europe par l’Amérique et le Japon, fut chargé de faire une enquête ; il fut décidé qu’un haut fonctionnaire résiderait