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écoles chinoises de toute catégorie, de cet ensemble d’établissemens scolaires va sortir toute une Chine nouvelle.

Cette Chine nouvelle sera une Chine japonaise. C’est sous l’influence japonaise que toutes ces réformes ont été résolues et accomplies ; le rapport de Tchang-Po-Si, président de l’Université, sur « la réorganisation de l’instruction dans l’empire chinois, » d’après lequel ont été créées les écoles et adoptés les programmes nouveaux, a été rédigé sous l’inspiration directe des Japonais. Tchang-Po-Si conseille de choisir tous les professeurs parmi les Nippons excepté ceux qui enseignent les langues ; de fait, dans les Écoles normales qui viennent d’être fondées, tous les professeurs étrangers sont des sujets du Mikado ; les élèves eux-mêmes sont affublés d’un costume demi-chinois, demi-japonais. Il serait superflu d’insister sur l’influence énorme qui ne saurait manquer de résulter pour les Japonais de cette mission éducatrice.

La fièvre des nouveautés gagne jusqu’aux femmes : des écoles commencent à s’ouvrir pour leur assurer une bonne instruction ; quelques-unes vont étudier au Japon ; d’autres se pressent aux écoles nouvellement créées en Chine, à celle notamment que la femme du vice-roi progressiste Yuan-Chi-Kai a ouverte à Tien-tsin ; l’Impératrice elle-même a ordonné, en novembre dernier, de créer à Pékin une école métropolitaine d’enseignement à l’européenne pour les filles. Il est inutile d’ajouter que, dans ces écoles nouvelles, tous les professeurs sont Japonais. Les Jésuites ont fondé à Zi-ka-wei une école pour les jeunes filles de la classe supérieure. Un mouvement d’émancipation féminine secoue la vieille société où la femme, humble servante d’un mari qu’elle épousait sans l’avoir jamais vu, demeurait toute son existence à la maison, vouée aux soins du ménage, ignorante de la vie extérieure. Les mœurs américaines, propagées par les sociétés de missions, se répandent peu à peu et préparent le relèvement moral de la femme. La « Société pour les pieds naturels, » patronnée par Mrs Archibald Little, a obtenu de l’Impératrice, en novembre 1902, un édit où la pratique barbare du bandage des pieds des petites filles est déconseillée ; plusieurs vice-rois ont veillé à ce que les bons conseils de la souveraine ne restassent pas lettre morte, et ils insistent maintenant auprès d’elle pour obtenir que les « petits pieds » soient formellement interdits. La femme chinoise, maintenant, lit ; elle a ses