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les circonstances, avait envoyé un de ses officiers au Comité de Salut public pour nouer de bons rapports entre l’autorité militaire et la nouvelle autorité civile.

Cette autorité nouvelle, devant laquelle chacun semble s’incliner, c’est la Commune. Elle ne sera proclamée à Paris que six mois plus tard ; mais à Lyon, dès le 4 septembre, c’est la Commune qui gouverne. Quand elle devra bientôt se retirer, en maugréant, devant un conseil municipal élu, elle se réfugiera dans les comités révolutionnaires, d’où elle menacera le représentant du pouvoir central, provoquera des prises d’armes, et en des retours éphémères apparaîtra de nouveau à l’Hôtel de Ville, sans savoir besoin d’y rapporter son drapeau, qui n’aura pas cessé d’y défier les couleurs nationales.

Son esprit lui survivra d’ailleurs dans la majorité du conseil municipal. Elle peut, dès le 4 septembre, s’approprier cette déclaration de principes qu’on lira le 19 avril 1871 au Journal Officiel de la Commune de Paris : « La Commune est le pouvoir unique ; son autonomie est absolue ; elle vote le budget communal ; elle répartit et perçoit l’impôt ; elle choisit les magistrats ; elle organise la défense urbaine, l’instruction publique et l’administration ; elle vote et réalise toutes les réformes administratives et économiques destinées à universaliser le pouvoir et la propriété. »


V

Le 6 septembre, à dix heures du matin, Challemel-Lacour arrivait à Lyon, avec sa valise, son ami et secrétaire particulier Dionys Ordinaire, et un neveu quelconque sans emploi déterminé.

Challemel-Lacour était à peu près inconnu de ses nouveaux administrés. Quelques lettrés avaient lu de lui des articles dans les revues ; les républicains les mieux informés savaient qu’ancien normalien, ancien professeur de philosophie, il avait été proscrit après le 2 décembre ; qu’il avait longtemps habité la Belgique, et que, plus récemment, il avait avec Delescluze organisé la souscription pour l’érection d’un monument à Baudin.

Introduit dans la salle des fêtes, où siégeait solennellement le Comité de Salut public, le préfet du gouvernement de la Défense nationale y fut reçu avec les égards dus au représentant