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l’excommunication jusqu’aux porteurs de contraintes, gardes civiques, valets de ville et afficheurs, » le moindre fonctionnaire se trouvait aussi embarrassé que l’était Miollis lui-même à Rome. Et quand on a recours aux évêques, ceux-ci, avec un visage impassible qui dissimule mal une joie ironique, répondent qu’ils n’y peuvent rien, le Pape ayant parlé.

En réalité, bien avant que le confessionnal eût exercé son action, les refus avaient été tels que, sauf de rares exceptions, on avait, somme toute, dû se résoudre à accepter, du haut en bas de la vaste échelle administrative, sinon ces « mauvais sujets » dont par le Rœderer, du moins de très médiocres individus. Pendant ces quatre années de règne, l’administration se trouvera sans cesse desservie par de bas agens mal préparés à leur emploi, depuis ce fonctionnaire de Narni qui, ayant été valet de chambre, ne peut frayer avec personne, jusqu’à ce juge de paix de Città di Castello qui, rouant de coups sa femme et ses administrés, parut on ne peut moins désigné pour rétablir la paix entre ses justiciables. Et lorsqu’on a trouvé, dans le patriciat même, un jeune et brillant sujet qui accepte d’être secrétaire général de la préfecture de Rome, on s’aperçoit que c’est un enfant prodigue, on le prend en flagrant délit de concussion, ce qui ne l’émeut guère, car, dit-il cyniquement, on a trop besoin des siens pour le punir et même le destituer. On parle aux Romains de Caton et de Cicéron et, en attendant, ils n’aperçoivent que de petits Verres. Les honnêtes gens ont refusé les places.


L’Empereur et la Consulte n’en tirèrent qu’une conclusion, c’est qu’une opposition, aussi monstrueuse chez des gens qu’on délivrait d’un joug abominable, venait de ce que le joug n’était point complètement brisé et qu’il fallait faire place nette des débris encore dangereux de l’ancien gouvernement.

La Consulte s’était, dès les premiers jours, attachée, avec une singulière ardeur, à l’œuvre de destruction. En huit jours, des institutions séculaires avaient été supprimées d’un trait de plume. Par plus de cent cinquante arrêtés, ces fonctionnaires, arrivés de la veille, bouleversèrent Rome, cette ville où, plus que partout ailleurs, la tradition règne en maîtresse souveraine : abolition des administrations pontificales, bureaux et tribunaux, réforme du régime hypothécaire, suppression du Loto, substitution du franc à l’écu et du sou au bajocque, révision du régime