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Pour qu’une note gaie se mêle au solennel événement, la ville des papes est autorisée à se croire dotée sous Napoléon du « régime constitutionnel, » et, malgré les canons, les sabres, la conscription prochaine, les préfets et sous-préfets, percepteurs, commissaires de police et gendarmes, à se proclamer aux termes du décret « ville impériale et libre. »

Il est vrai que le soir même de cette mémorable journée, dans le calme de son cabinet du palais des Farnèse, le prévoyant Saliceti écrit à Fouché, fait pour le comprendre à demi-mot : « Il faudra ici un solide directeur de police. »


Saliceti voyait juste. Assurément une étude plus approfondie des circonstances dans lesquelles Rome était réunie à l’Empire nous permettra un jour de découvrir, dans le principe même de cette annexion, les causes du malentendu qui, dès l’abord, tint éloignée de l’Empereur la ville pour laquelle il ressentait une affection allant jusqu’à l’amour. Ce que nous avons dit suffit, pour l’heure, à faire prévoir et comprendre les difficultés sans nombre au milieu desquelles allaient se débattre les hommes qui, le 10 juin 1809, prenaient si bruyamment possession de Rome.

Fort heureusement, ils étaient, — sauf l’avisé Saliceti, — très loin de les prévoir et, au cas où ils les eussent prévues, suffisamment confians dans le génie de l’Empereur pour ne les point craindre.

Les membres de la Consulte, — gouvernement provisoire de cinq membres accordé à Rome, en attendant qu’un gouverneur général s’y vînt installer, — partageaient l’imperturbable confiance que les hauts fonctionnaires français, fussent-ils les moins inféodés à l’Empereur, plaçaient dans la fortune invincible de Napoléon et de leur pays.

Dans l’idée qu’ils auraient à séduire plus qu’à réprimer, l’Empereur les avait choisis parmi des hommes qui lui paraissaient doués de plus de tact encore que de fermeté. Il avait en cela obéi au sentiment quelque peu tendre qu’il nourrissait à l’égard d’une ville que, pour rien au monde, il n’entendait, en ce bel été de 1809, violenter ni opprimer. D’autre part, il avait tenu à les prendre d’une éclatante probité, désireux d’effacer les honteux souvenirs qu’avait laissés sur les bords du Tibre le régime franco-romain de l’an VI.

À ce double titre, le général Sextius de Miollis se