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en battant. Dans le Midi, les ouvriers à la tâche ou solatiers sont aussi payés en nature. A Venès (Tarn), le solatier se charge de la moisson, du battage, et doit livrer le grain vanné dans le grenier du propriétaire ; il a pour sa part le huitième de la récolte en blé, le septième en avoine.

Les 3 058 346 auxiliaires ou salariés (enquête de 1892) se partagent en 16 000 régisseurs, 1 210 081 journaliers, 1 832 114 domestiques de ferme ; de 1882 à 1892, ils ont donc diminué de près de 400 000, et, à défaut de la statistique décennale de 1902 qu’on ne se presse pas de publier, les enquêtes particulières, les monographies locales, révèlent que ce phénomène social n’a pas cessé de s’accentuer. Le contrat de travail comporte bien des variétés, et, par exemple, dans le Calvados, quand un propriétaire exploite deux domaines éloignés l’un de l’autre, il confie le soin de son bétail à une personne âgée ou ne pouvant fournir que peu de travail ; on l’appelle un met-dehors, et elle a le logement.

N’est-ce pas Gladstone qui appelait le XIXe siècle, le siècle des ouvriers ? Rien de plus vrai, et c’est bien là un de ses titres d’honneur ; le gain moyen du travailleur agricole a augmenté plus vite que le loyer de la terre : de 1700 à 1788, il ne s’accroît que de 11 pour 100, tandis qu’au XIXe siècle, et surtout depuis 1850, la hausse atteint 250 à 300 pour 100. Rien de plus difficile que de donner ici des moyennes véridiques, de déterminer exactement le salaire général ; la différence des régions, la qualité, la force des ouvriers, le travail à la tâche, le paiement en nature, rendent le problème très compliqué. Rien de plus individuel que le salaire agricole : la bourse de l’employeur s’entr’ouvre, se ferme, ou s’ouvre toute grande, suivant que l’employé est fort ou débile, vaillant ou fainéant, adroit ou malhabile, régulier ou fantaisiste. Aux pauvres gens travail est pain, paresse est misère, et Gœthe se moque lorsqu’il fait dire à un parasite : « Si je dors, je dors pour moi ; mais si je travaille, sais-je donc pour qui ? » Voici les départemens où l’on trouve les salaires les plus élevés : Seine-et-Marne, Seine-et-Oise, Aisne, Oise, Eure, Marne, Meuse, Loiret, Indre et Indre-et-Loire, Bouches-du-Rhône. Rentrent dans la moyenne les départemens de l’Est, quelques départemens du Nord, une partie du Centre et du Sud. La zone de l’Ouest, avec les départemens normands, la Bretagne, les Landes, les Basses-Pyrénées, présente