Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 28.djvu/360

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tenons à connaître, l’un ne nous intéresse qu’en tant qu’il est le confident, l’inspirateur ou l’interprète de l’autre. Dans le mémorandum au cardinal Santucci, nous cherchons « l’idée de Cavour, » que Pantaleoni jure être « substantiellement identique » à la sienne ; et voici donc le fragment de ce mémorandum où Pantaleoni se fait fort de la traduire. Il a précédemment invoqué le témoignage de trois philosophes qui sont des prêtres, le Père Ventura, Rosmini et Gioberti, puis celui de tous ces libéraux et de tous ces patriotes qui sont des catholiques, un Manzoni, un Tommaseo, un Roberto d’Azeglio, un Giorgini, un Capponi, un Galeotti, un Minghetti. Il veut démontrer que l’Eglise a besoin d’une réforme, qu’elle ne peut se réformer que dans et vers la liberté, qu’il n’y a point d’antagonisme irréductible entre elle et le nouveau royaume d’Italie ; qu’au contraire, s’il ne peut être grand que par elle, elle-même ne peut être indépendante que par lui. Sa thèse est délicate, s’adressant à qui il l’adresse.


Celui qui écrit ces pages est convaincu, intimement convaincu, que, si la papauté le veut sincèrement, l’accord entre la papauté et le nouveau royaume se fera et se fera sur ce régime de liberté que nous avons défini ci-dessus. Il est inutile de dire que l’auteur (du mémorandum] n’a caractère ni officieux ni officiel pour faire des propositions au Souverain Pontife, mais néanmoins, ayant des sentimens communs et uniformes avec ceux qui dirigent les affaires en Italie et lié avec eux d’une longue amitié, il peut garantir que, si l’on donnait ouverture à de loyales négociations, on rencontrerait en eux toute disposition à un arrangement fondé sur les conditions les plus larges, où le Saint-Père aurait la liberté d’action la plus étendue et indéfinie dans l’exercice de son autorité spirituelle et pontificale, aurait l’indépendance, aurait l’inviolabilité pour sa personne, l’inviolabilité pour ses ministres et légats, la libre communication avec tous les fidèles, garantie de temporalité, des biens à lui assurer non seulement en Italie, mais au dehors ; pour les rapports intérieurs de l’Église et de l’État, on adopterait le principe de l’Église libre dans l’État libre ; et par suite abolition, aussi pleine que possible, de toutes les restrictions Joséphines, Léopoldines, Tanucciennes, et autres, même stipulées par des concordats. Liberté de prédication, liberté d’instruction, liberté de l’exercice de l’autorité spirituelle des évêques, libre élection de ceux-ci sans l’intervention du gouvernement, etc. Pour les bénéfices temporels, qui ont été l’éternelle cause, dès Grégoire VII, et avant lui, jusqu’à nos jours, de lutte et de scandale entre l’État et l’Église, on adopterait un tempérament qui rendrait pour toujours indépendante et intangible la portion de ces bénéfices qui s’applique au maintien de l’épiscopat et du clergé ayant charge d’âmes, et les dépenses essentielles du culte. Ces propositions touchent le sommet des libertés ecclésiastiques[1]

  1. Queste proposizioni toccano l’apice delle ecclesiastiche libertà...