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tuées, ont secoué leur torpeur : le mouvement, désormais, ne se concentrera plus sur quelques points privilégiés du territoire ; il se manifestera au centre comme aux extrémités, apportant en tout lieu un regain de travail et de vie… De son côté, le moteur à pétrole tend à prendre lui-même une extension imprévue ; il actionnait déjà des machines-outils, des machines agricoles, des pompes, etc. ; le voilà maintenant employé dans la navigation et c’est évidemment à ses progrès incessans que les moteurs à explosion de la grande industrie doivent leur vogue croissante et que la sidérurgie est redevable de ces moteurs à gaz de haut fourneau dont elle attend sa rénovation. N’oublions pas, aussi, que c’est un moteur à pétrole qui a permis à Santos-Dumont de gagner le prix Deutsch et que c’est ce moteur, peut-être, qui nous aidera à résoudre pratiquement, par le plus lourd que l’air, le problème de la navigation aérienne. Inutile, ici, d’allonger cette énumération des conséquences, directes ou indirectes, de l’entrée de l’automobilisme dans notre vie et dans nos habitudes : une des plus imprévues, en tout cas, est d’avoir mis le grand public à même de jouir du confort des roues à pneumatiques.

Mais, abstraction faite de l’intérêt qui s’attache à la création d’une industrie entièrement nouvelle, reconnaissons que l’automobilisme doit nous intéresser, nous, tout particulièrement puisque, grâce à leur initiative, à leur énergie, à leur intelligence, nos compatriotes ont su acquérir, sur ce terrain difficile, une incontestable suprématie. À cet égard, nul doute n’est possible, car les chiffres donnés par les Douanes françaises sont éminemment suggestifs et aucun pays au monde ne pourrait en fournir de semblables : à peu près nulle il y a huit ans, assez faible encore en 1900, notre exportation en automobiles s’est brusquement élevée à 15 782 000 francs en 1901, 30 219 000 francs en 1902, 50 837 000 francs en 1903, 71 302 000 francs en 1904, au total, en quatre ans, une somme de 168 140 000 francs. Encore faudrait-il tenir compte de l’industrie naissante des motocycles, dont l’exportation se présente comme il suit : 167 000 francs en 1901, 548 000 francs en 1902, 561 00 francs en 1903, 1 202 000 francs en 1904. Quant à nos importations, leur totalité s’élève à peine, pendant ces quatre années, automobiles et motocycles compris, à 6 919 000 francs. Résultat : plus de 100 000 ouvriers vivent, dans notre pays, de l’automobilisme et on peut évaluer à 300 000 le nombre des travailleurs de