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une discussion épuisée sur l’article premier. Buffet le pria publiquement de s’expliquer : il ne le fit pas. Il ne prit la parole qu’à propos de la garde mobile, et, sans même monter à la tribune, il prononça de sa place deux petits discours pour soutenir qu’elle n’était pas nécessaire : « Je ne suis pas partisan de la guerre défensive, c’est une guerre qui ne réussit guère, qui n’est admissible que lorsqu’on ne peut pas en faire une autre. Il n’y a qu’une guerre. On porte à son ennemi, le plus vite et le plus énergiquement qu’on peut, des coups décisifs, et on ne passe à la guerre défensive que quand on n’a pas été heureux dans l’autre, ce qui ne va pas d’ailleurs au caractère français. (Approbation sur un grand nombre de bancs.) Mais on dirait qu’il n’y a que la garde nationale pour défendre le pays et que, la garde nationale mobile n’étant pas constituée, la France est découverte. Je vous le demande, à quoi vous servirait cette admirable armée active qui nous coûte 4 à 500 millions par an ! Vous supposez donc qu’elle sera battue dès le premier choc, et que la France sera immédiatement découverte ?… On vous présentait l’autre jour des chiffres de 1 200, de 1 300, de 1500 000 hommes, comme étant ceux que les différentes puissances de l’Europe pouvaient mettre sur pied. Eh bien, ces chiffres-là sont parfaitement chimériques. La Prusse, selon M. le ministre d’État, nous présenterait 1 300 000 hommes ! Mais, je le demande, où a-t-on jamais vu ces forces formidables ? Combien la Prusse a-t-elle porté d’hommes en Bohême, où était le théâtre décisif des événemens en 1866 ? 330 000 environ. C’est qu’il ne faut pas se fier à cette fantasmagorie de chiffres qui sont étalés dans toute l’Europe aujourd’hui. Sans doute, il y a une funeste impulsion vers les armemens exagérés, mais il ne faut pas nous présenter comme réels des chiffres qui sont tout à fait chimériques. Et je le dis, parce qu’il faut enfin rassurer notre pays. Il ne faut pas que les paroles qui sont prononcées ici lui persuadent qu’il est dans des périls tellement effroyables… Eh bien ! quand nous voyons que l’armée que nous pourrions présentera l’ennemi, serait, dépôts déduits, n’oubliez pas cela ! de 540 000 hommes avec sept ans de service, de 600 000 hommes avec huit ans, et de 680 000 hommes avec neuf ans, je dis que la France aurait le temps de respirer derrière une aussi puissante armée, et j’ai la confiance, moi, que cette armée donnerait le temps à la garde nationale mobile de s’organiser. Et maintenant,