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par exemple, le Conseil repousse la proposition de demander à Leurs Excellences un drapeau et deux canons pour la fête, tandis qu’il accepte celle d’ajouter au cortège une « division de la Paix, » et de terminer par un bal[1] ; un autre jour, l’abbé mande « tous les maîtres qui peignent en couleurs, » et leur « fait promettre qu’ils ne peindront aucun des objets qui leur seront apportés pour la Parade autrement que de vert et de blanc ; » ce qui signifie, ainsi qu’il est expliqué dans la marge du registre, « que rouge, bleu et blanc sont défendus[2] : » et de cette précaution même, on peut inférer que quelque peintre malicieux aurait peut-être eu l’idée de mêler les trois couleurs de la Révolution au rouge et noir des despotes bernois, au vert et blanc de leurs pacifiques sujets. La plus complète harmonie règne entre le Conseil et le bailli, G. R. Tscharner : tellement que celui-ci envoie à Sa Révérence, pour contribuer aux frais de la fête, « un petit groupe de 30 petits écus, » en plaisantant agréablement sur ces « 50 Suisses » qui formeront « une faible garde de la cour de Cérès et de Palès[3]. » La bienveillance de cet excellent bailli ne gêne en rien sa prévoyance : la fête ayant été fixée au 9, et le bal au lendemain, il faut s’assurer que cette date du 10 août n’a pas été insidieusement choisie pour commémorer le massacre des Suisses[4]. Tant de soins sont récompensés : tout se passe, une fois encore, dans le plus bel ordre, et la fête est plus brillante que jamais. L’introduction d’une troupe de Paies vient compléter le cortège, divisé maintenant, — comme il le resta dès lors, — en quatre troupes, qui représentent les Quatre Saisons et défilent sous la garde des anciens guerriers suisses. D’abord la troupe du Printemps, marchant derrière l’abbé, les conseillers, le drapeau et la musique : ce sont des bergers et bergères, des faucheurs et faucheuses, des canéphores, un char de foin, la déesse, son prêtre, ses suivantes. L’Eté groupe autour de Cérès une charrue, des semeurs, des tasseurs de mottes, des moissonneurs, des glaneurs, un char de blé, etc. Les vignerons couronnés marchent en tête de la troupe de l’Automne, suivis des « Marmousets » et de la forge de Vulcain, puis du corps des Vignerons, de Bacchus entouré de Faunes et de Bacchantes, de Silène sur son âne, de la grappe de Chanaan, de

  1. Manuaux, 3 juillet.
  2. Ibid., 10 juillet.
  3. Ibid., 3 août.
  4. Archives de Berne, Aklen des Geheimen Rates, Bd. XXXVI, n° 89. (Communication de M. Türler.)