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elle y produit une note nouvelle et ne le reproduit pas. Elle délimite : elle ne donne à aucun degré, comme la peinture, l’idée de l’impalpable de l’horizon, de l’illimité. Elle ne laisse rien à faire à notre faculté imaginative. Ce n’est pas une évocation : c’est une définition. De plus, elle s’exprime essentiellement en lignes et non pas en masses, ni en tons. Quand elle veut s’exprimer en masses, elle se confond avec l’architecture, si ces masses sont régulières, et, si elles ne le sont pas, avec la nature géologique. Quand elle veut s’exprimer en tons, elle se confond avec la peinture, sans avoir cependant, comme elle, la ressource de représenter l’espace. C’est donc bien la ligne qui reste l’essentiel de cet art. Qu’il soit difficile de la renouveler, après tant de maîtres et tant de modèles, sans doute. Qu’on cherche dans toutes les modalités de la matière, de sa masse, de son équilibre, de ses jeux d’ombre et de lumière, de ses effets de noir et de blanc, le secret d’un renouvellement plastique, d’accord. Mais pour qu’il y ait un renouvellement vrai, il faut qu’il y ait quelque renouvellement dans la ligne. Le chercher dans les effets dits « impressionnistes, » c’est tomber dans la même erreur où sont tombés les classiques au commencement du XIXe siècle. Du temps de David, on cherchait à renouveler la peinture en introduisant dans les tableaux des statues. Tatius, les Sabins, la femme qui écarte les combattans, Léonidas, sont des marbres antiques disposés dans une nature qui ne leur est de rien, faisant des gestes qui n’ont aucun rapport pittoresque entre eux, et manifestement choisis pour ce qu’ils développent de lignes harmonieuses. Qu’on mette bout à bout tes groupes de marbre du jardin des Tuileries, et l’on aura facilement l’illusion d’une galerie de tableaux de cette époque. À ce moment-là, on oubliait les ressources de la peinture pour lui faire, tant bien que mal, imiter la statuaire. Aujourd’hui, la tentative est inverse, mais l’erreur est la même et symétriquement superposable. On oublie les ressources de la sculpture pour lui faire, tant bien que mal, exprimer des effets de noir et de blanc. Ce n’est point là, non plus, que la modernité de la statuaire peut être trouvée.


III

Sera-ce dans la myologie ? Ce sont de bien petites modifications, celles qu’on peut apporter, d’âge en âge, aux