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comme deux religions et qu’on ne peut tolérer un état de choses si contraire à la nature et à l’office de l’Église, qu’à la condition que rien ne soit fait par les chefs de l’Église pour rendre le recouvrement de la doctrine et de la pratique catholique plus difficile, ou pour consolider la position de ceux qui, dans l’Église, au point de vue catholique, ne devraient jamais être admis à occuper la position qu’ils tiennent maintenant.


L’auteur pouvait-il se faire l’illusion que l’accomplissement de la condition énoncée dans la seconde partie de sa proposition remédiait sérieusement au désordre qu’il signalait dans la première ? D’ailleurs, quelques mois plus tard, le même lord Halifax a dit, en termes plus catégoriques encore, dans un meeting de l’English Church Union[1] :


En récitant l’article du Credo : « Je crois en une Église, une, sainte, catholique et apostolique, » professons-nous notre foi en une Église qui, en ce qui regarde les matières de foi définies et tenues pour telles par le corps tout entier, ne peut être en contradiction avec elle-même ?… Alors, la doctrine vraie de l’Église d’Angleterre, quant… à la présence réelle de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans le sacrement de l’autel, à l’adoration due à la présence sacramentelle du corps et du sang du Christ sous les espèces du pain et du vin, au sacrifice eucharistique,… au pouvoir conféré à l’Église de pardonner les péchés, et au devoir qui en découle, en cas de péché grave, de recourir au sacrement de Pénitence,… au pouvoir conféré à la prêtrise, ne sont pas des questions ouvertes.


De ce langage, si formel soit-il, je ne conclus pas qu’on est résolu à précipiter la solution. L’extrême gravité des conséquences peut faire hésiter les plus convaincus et les plus hardis. Toutefois, il est évident que l’idée marche. Le jour où elle se traduirait dans les faits et amènerait la séparation des élémens catholiques et protestans, aujourd’hui réunis dans l’Église établie, où se ferait la coupure ? C’est un inconnu qui s’ajoute à beaucoup d’autres. Parmi les High churchmen, les convictions et les caractères ne sont pas tous de même trempe ; on ne saurait dire combien d’entre eux se croiraient obligés à rompre et surtout auraient le courage de le faire. Et puisque notre curiosité essaie, un moment, d’interroger l’avenir, une dernière question se pose encore. Les Ritualistes, une fois séparés des protestans pour affirmer leurs convictions catholiques, s’arrêteraient-ils, pour ainsi parler, à mi-chemin, et ne seraient-ils pas conduits, par la logique de leur

  1. Meeting tenu à l’occasion du Church Congress de Liverpool, en octobre 1904.