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deux archevêques de Canterbury et d’York se sont offerts à décider en arbitres les questions controversées. Deux leur sont soumises, celles de l’encens et de la réserve des espèces consacrées. Après des débats prolongés entre les champions de chaque parti, les archevêques prononcent, sur les deux points, contre les Ritualistes. Grand mécontentement chez ces derniers ; ils s’indignent surtout de la décision sur la réserve, où ils discernent un déni de la persistance de la présence réelle et du devoir d’adoration. Arguant de ce que les prélats ont statué non en vertu de leur pouvoir ecclésiastique, mais comme interprètes d’un Acte du Parlement, et de ce qu’en tous cas ils se sont mis en désaccord avec l’usage de l’Église universelle, ils déclarent que ces décisions ne sauraient lier les consciences ; ils n’y voient que des opinions particulières sans autorité canonique et affectent de les appeler « the Lambeth opinions. » Les plus ardens annoncent tout de suite leur résolution de ne pas obéir. D’autres, il est vrai, sont moins absolus, et il en résulte quelque tiraillement dans le sein de l’English Church Union. Les archevêques n’ont pas prétendu que leur avis eût aucune force exécutoire ; c’est à chaque évêque de prendre les mesures d’application qui lui paraîtront opportunes. En fait, la conduite varie suivant les diocèses. Dans certains, les évêques prétendent interdire rigoureusement l’encens et la réserve, et indigent une sorte de « boycotage » aux réfractaires ; dans d’autres, ils laissent faire, ou tout au moins, à Londres, par exemple, usent de tempéramens, de délais et de compromis. On est donc loin d’avoir obtenu l’uniformité désirée, d’autant qu’en dehors des deux seuls points tranchés par les archevêques, il est beaucoup d’autres pratiques ritualistes qui continuent comme par le passé.

Aussi les adversaires du Ritualisme, après avoir un moment applaudi aux décisions des archevêques, sont-ils loin de se montrer satisfaits des résultats obtenus. Kensit et ses acolytes continuent, à travers toute l’Angleterre, leur campagne d’agitation tapageuse, troublent les offices divins, et cherchent à exciter partout le fanatisme protestant, sous sa forme la plus grossière. Des élections générales ayant lieu en octobre 1900, un grand effort est fait pour y mêler la question ritualiste. La Church Association, un peu effacée depuis ses déconvenues judiciaires, rentre en scène, avec ce mot d’ordre électoral : Protestantism before politics. Mais, en dépit des sommes considérables