Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 27.djvu/603

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Parlement le droit de régler la doctrine, la discipline et le cérémonial de l’Eglise d’Angleterre ; » ils refusent même aux chefs de cette Eglise le pouvoir de leur imposer des règles en opposition avec celles de l’Eglise universelle, — doctrine qui, soit dit en passant, devait sonner étrangement aux oreilles protestantes ; — ils déclarent qu’ils « seront heureux de souffrir, s’il le faut, pour leurs principes, » et, aux menaces qu’on leur adresse, ils répondent en menaçant, à leur tour, de rupture et de « désétablissement. » Cette attitude de défi n’est pas pour apaiser les adversaires et faciliter la tâche des évêques. Aussi voit-on, sur une caricature du temps, l’archevêque de Canterbury embrassant, éperdu, le tronc chancelant d’un arbre qui figure l’Eglise établie, tandis qu’à l’extrémité d’une branche toute prête à se rompre, un Ritualiste en grand costume brandit fièrement un encensoir ; au bas, on lit : l’archevêque : « Pour l’amour de Dieu, finissez vos bêtises, ou vous allez tout casser ; ça craque déjà. — Le Ritualiste : « Je m’en f…[1]. »

Plusieurs fois, au cours de la session de 1899, la question du Ritualisme est soulevée dans les deux Chambres du Parlement. Les ministres dirigeans, lord Salisbury à la Chambre des lords, M. Balfour aux Communes, manœuvrent habilement, en dépit de l’excitation des esprits, pour écarter les mesures coercitives, blâmant en théorie certaines formes ritualistes, prêchant en pratique la patience et la modération. Quand, en mai, la Chambre basse est saisie d’un Church discipline bill, proposé en vue de recommencer, en les aggravant, les persécutions judiciaires du Public worship régulation Act, M. Balfour parvient à l’ajourner, par le vote d’un amendement ainsi conçu : « La Chambre, n’étant pas préparée à accepter une mesure qui crée de nouveaux froissemens et méconnaît l’autorité des évêques en ce qui concerne le maintien de la discipline ecclésiastique, opine que, si les efforts, tentés maintenant par les archevêques et les évêques pour assurer la légitime obéissance du clergé, n’ont pas un prompt effet, il sera nécessaire de procéder à une législation ultérieure pour sauvegarder l’observation des lois existantes de l’Église et du Royaume. »

Que va pouvoir faire l’épiscopat pour accomplir l’œuvre, faute de laquelle le Parlement s’est réservé d’intervenir ? Les

  1. Rapporté par M. l’abbé Dimnet, dans un article de la Revue du clergé français, avril 1899.