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œuvre ; et, sans les comparer ni prétendre les égaler à ces derniers, on peut aussi saluer en eux de nobles et de belles âmes. Newman, le meilleur juge en cette matière, écrivait d’eux, dès 1882, dans une lettre au doyen Lake : « J’éprouve beaucoup de sympathie pour les Ritualistes, parce que je sais quel principe élevé est derrière leurs actes, quel est le succès de leur œuvre, et aussi de quelle indigne, et injuste façon ils sont traités par leurs adversaires[1].


V

Si l’on a pu dire que le jugement prononce dans le Lincoln’s case terminait victorieusement la longue lutte soutenue par les Ritualistes pour s’assurer leur place dans l’Eglise d’Angleterre, il n’en faudrait pas cependant conclure que ceux-ci fussent désormais à l’abri de tout retour offensif de la part des protestans. Non, quelques années ne devaient pas s’écouler avant qu’ils ne fussent assaillis de nouveau par une violente bourrasque. Le moment n’est pas venu d’entreprendre le récit détaillé de cette seconde crise dont le dénouement est encore à venir et qu’on peut, jusqu’à nouvel ordre, croire plus bruyante que réellement menaçante. Toutefois, une indication rapide et sommaire des événemens paraîtra peut-être un utile épilogue de l’histoire que je viens de raconter.

Ce réveil de passion protestante a suivi l’échec de la campagne entreprise par lord Halifax, en 1895 et 1896, pour amener la réunion de l’Eglise d’Angleterre et de l’Eglise romaine. Les adversaires des Ritualistes, les voyant à la fois compromis par leurs avances à Rome, humiliés et en désarroi par l’échec mortifiant de ces avances, jugent alors l’occasion favorable pour essayer de prendre leur revanche. Des livres, perfidement rédigés, lancent, dans le public, de redoutables actes d’accusation contre les Romanisans[2]. On ne se contente pas des polémiques "de presse : un certain Kensit, petit libraire de la Cité, personnage de peu de considération, se met en tête, au commencement de 1898, de porter la bataille dans l’intérieur même des églises ritualistes. Il débute, le vendredi saint, dans sa paroisse, où a été introduite la cérémonie catholique de l’Adoration de la

  1. Memorials of Dean Lake, p. 259, 260.
  2. Cf. notamment The Secret History of the Oxford Movement, par W. Walsh. Ce livre, qui devait être suivi un peu plus tard d’un autre, intitulé : The Romeward Movement, a été répandu à plusieurs milliers d’exemplaires.