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presque tous passé entre les mains, sont tout simplement, quoi qu’on en ait dit, des crânes de vrais égyptiens. Il ne peut y avoir de doute à cet égard. Les cadavres de ces anciennes races, dont la haute antiquité n’est pas contestable, sont enterrés sans être embaumés, et dans une attitude spéciale : il ne découle cependant point forcément de ce fait que ces restes humains appartiennent à une race différente de celle des vrais Egyptiens. Cette invasion d’une population asiatique, que nie aussi la linguistique, amenant avec elle des bœufs à longues cornes, est donc une supposition qui nous semble absolument gratuite, que rien jusqu’ici ne semble sérieusement justifier. La vallée du Nil, ainsi que le centre de l’Afrique, jusqu’au lac Tanganika, a joui très probablement, depuis l’époque crétacée, des mêmes conditions climatériques qu’elle présente aujourd’hui, et qu’on ne rencontre nulle part ailleurs à la surface du globe. Dans un tel milieu, d’une stabilité si constante, races humaines et races animales ont dû acquérir des caractères tout à fait spéciaux, en harmonie avec des influences climatériques si remarquables.

On peut donc croire que les prédécesseurs des Egyptiens de Rhamsès se sont formés de toutes pièces, dans la vallée du Nil, de même que leurs bœufs et leurs moutons. Aux époques reculées où se sont déposées les couches les plus superficielles de la période tertiaire, des forces à nous inconnues ont fait naître des Egyptiens dans la vallée du Nil, des nègres dans une partie de l’Afrique centrale, des Berbers dans l’Afrique antérieure, des bœufs à longues cornes qui ont pu à cette époque, naître sur place aussi facilement que dans les montagnes de l’Inde, les plaines de la Perse ou celles de la Mésopotamie. Toute la paléontologie des chevaux et des bœufs, ainsi que les découvertes récentes faites en Égypte sur les formes ancestrales des éléphans africains, semblent prouver cette dernière hypothèse, qui est d’autant plus admissible que les lèvres grosses et fortement retournées, donnent aux Egyptiens anciens ou actuels un caractère africain hors de doute.

Le seul fait indiscutable et important que nous devions retenir ici, après ce long exposé des origines bovines, est que les Egyptiens élevaient presque exclusivement des bœufs à longues cornes de provenance africaine, et que, seulement aujourd’hui, cette race a été remplacée presque partout par celle du bœuf à courtes cornes arrivant d’Asie. Ces bœufs à longues