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la maison de 1). Brutus, qui était voisine, et les mit en relation avec Gabinius, un conjuré d’importance, qu’on envoya chercher.

Quand ils surent d’une manière encore vague de quoi il s’agissait et ce qu’on demandait d’eux, ils furent pris d’une grande incertitude. Ce n’étaient pas des motifs d’honneur qui les faisaient hésiter : ils se demandaient simplement ce qui leur serait le plus utile, et s’ils gagneraient davantage à participer à la conjuration ou à la trahir. Ils consultèrent Fabius Sanga, leur patron, qui leur montra que c’était le gouvernement qui avait le plus de chance de réussir, et n’eut pas de peine à les décider à se mettre avec les plus forts. Cicéron fut aussitôt averti, et il demanda aux députés de continuer la négociation. C’était un merveilleux moyen de connaître les plans des conjurés et de les prendre tous à la fois, du même coup de filet. Avant de s’engager, les Allobroges avaient besoin de savoir si le complot était sérieux. Il était naturel qu’on leur fît connaître les noms et les projets de ceux auxquels on leur demandait de s’associer. Ils étaient en droit d’exiger des assurances formelles, des promesses écrites, qu’ils pourraient communiquer à leurs compatriotes pour obtenir leur adhésion. Rien ne leur fut refusé. C’est ainsi qu’ils furent mis au courant de tout ce qui se préparait et qu’ils obtinrent des lettres des principaux conjurés écrites de leur main, avec leur nom, et leur sceau. — Ces barbares étaient des gens avisés et qui surent parfaitement jouer leur rôle.

Quand tout fut prêt, ils annoncèrent leur départ pour le 3 décembre, au matin. Ils devaient suivre la voie Flaminienne, qui passe le Tibre sur le pont Milvius (ponte Molle). Cicéron avait eu soin de prévenir deux préteurs qui lui étaient dévoués, L. Valerius Flaccus et C. Pomptinus ; ils amenèrent sans bruit des soldats dont ils étaient sûrs et les cachèrent dans deux fermes, des deux côtés du pont. Les Allobroges arrivèrent à la fin de la troisième veille de la nuit (vers quatre heures). Us avaient avec eux T. Volturcius de Crotone, chargé de les accompagner au camp de Catilina où ils devaient s’arrêter en passant, et quelques conjurés qui leur faisaient la conduite. Quand ils furent engagés sur le pont, les troupes sortirent de leurs cachettes en poussant de grands cris. Les Allobroges, comme on pense, ne se défendirent pas ; les autres, voyant la résistance impossible, se laissèrent prendre, et tout le monde fut ramené à Rome.

Aussitôt on avertit le consul qui, au petit jour, manda les