Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 27.djvu/318

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

primat. Celui-ci recevait de nombreuses lettres de protestation, tristes ou irritées, écrites par des ecclésiastiques accoutumés à entendre des confessions. Pusey insistait, auprès de l’archevêque, sur les avantages constatés de l’usage systématique de la confession dans les réunions de jeunes garçons, et il lui envoyait des statistiques relevées, à ce sujet, dans d’importantes écoles. Un clergyman, depuis longtemps voué au ministère paroissial, déclarait que, « sans l’usage habituel du confessionnal, ce ministère perdrait la moitié de son pouvoir. » D’autres, dont l’apostolat s’exerçait dans les quartiers misérables, en contact avec les formes les plus grossières du vice, envoyaient à Tait un compte détaillé de leurs expériences, et lui demandaient, non sans quelque amertume, « si, en présence de ces péchés si horribles, les seuls gens à blâmer et à entraver étaient ceux qui s’efforçaient de connaître le mal et de le saisir. » « Sachant ce que je sais, écrivait l’un d’eux, de l’extension de l’impureté et du remède qu’y apporte la confession, je ne puis m’étonner que le diable s’efforce de murer Bethsaïda et dise au malade qu’il n’a besoin de recourir à aucun homme pour l’aider. » Un autre écrivait :


Tandis que le public, excité par nos évêques et nos nobles, lève les bras en l’air à la seule idée que « nous touchons à ces choses, » qu’advient-il des choses elles-mêmes qui sont en train de ronger, comme un cancer, le cœur de la société haute et basse, d’enlever la virilité aux cœurs des hommes d’Angleterre, et la pureté aux cœurs des femmes ? J’ose prier Votre Grâce et les autres évêques, — s’ils veulent lutter contre l’invasion des péchés mortels dans le troupeau du Christ, au lieu de l’ignorer, — non seulement de ne pas condamner, mais au contraire de déclarer publiquement nécessaires, pour l’usage approprié et discret qu’en feront les ministres de la Parole de Dieu, quelques ouvrages du genre du Priest in Absolution[1].


Ces témoignages, venant d’hommes dont il était le premier à reconnaître le méritoire et efficace apostolat, n’eussent-ils pas dû faire réfléchir Tait et lui inspirer quelque regret de la violence de ses condamnations ? Ils lui montraient, en tout cas, quelle émotion ses paroles avaient suscitée dans les esprits et comme, par son fait même, on s’éloignait chaque jour davantage de la pacification rêvée. Aussi notait-il mélancoliquement sur son journal : « Cette question a soulevé, dans l’Église

  1. Life of Tait, t. II, p. 181 à 184.