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même dressé une sorte de tarif qui prévoit les cas les plus fréquens de malfaçon) et menus désordres : retards, troubles dans le travail, gamineries. Ici encore, elles sont « assez minimes » et, sauf de rares exceptions, ne diminuent que d’une fraction peu sensible le salaire de l’ouvrier. Ici encore, elles sont « reversées » à une caisse de secours, ou « rendues sous une forme quelconque à la collectivité des ouvriers ; » les amendes de police intérieure, toujours, et souvent, à ce qu’on nous assure, les retenues elles-mêmes pour malfaçon.

C’est l’usage de l’industrie, et tout le monde s’y conforme, puisqu’il n’y a pas de contrat de travail, au sens précis et juridique du mot. Le règlement de la fabrique fait loi. Quand on embauche un ouvrier, on lui montre le règlement, qui l’intéresse peu et qu’il ne regarde pas, car il le connaît déjà, comme étant à peu près le même partout, dans la même industrie et dans la même région. Ici, il est engagé définitivement, à partir du septième jour, et ne peut plus dès lors quitter l’usine, sans avoir prévenu quatre semaines à l’avance. Le même délai est obligatoire pour le patron qui veut renvoyer l’ouvrier. Ailleurs, il suffit de deux semaines, et les tribunaux s’en contentent, en particulier les prud’hommes, lorsqu’il y a litige. L’ouvrier, venu pour s’embaucher, présente ou ne présente pas son livret, presque indifféremment ; de part et d’autre, on semble à présent n’y attacher que peu d’intérêt. L’apprentissage, selon l’ancienne formule, n’existe plus. Il n’y a plus d’apprentis : il y a tout de suite de jeunes ouvriers et de jeunes ouvrières, ayant, aux termes de la loi, au moins treize ans révolus, et qui gagnent en entrant : 1 franc par jour pendant les deux ou trois premières quinzaines, 1 fr. 25 après ce temps-là ; puis qui deviennent bobineurs ou se casent dans un autre poste vacant, au bout, tout au plus, de quatre à cinq mois. Le jeune ouvrier est alors ouvrier, et son salaire s’élève assez vite. Les chiffres que nous avons cités montrent jusqu’où il peut atteindre, à quel âge il y atteint, et jusqu’à quel âge il y reste.


IV

Telle est, quant à l’organisation du travail, à sa peine et à son prix, la condition de l’ouvrier ou de l’ouvrière des filatures et tissages de coton dans le Nord et dans les Vosges : elle n’est